Le réveil des anges
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Ce sont vraiment...
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les premières...
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lueurs du jour.
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La piste, sous la brume.
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Le plateau est.
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La vallée de
la Seine.
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Le soleil pointe...
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le bout de son nez.
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La Seine est couverte...
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d'un film blanc.
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Il est la...
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pour la journée.
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Vers les Andelys.
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Le château d'eau a les
pieds dans la brume
et la tête au soleil
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Le plateau au ...
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nord des Andelys.
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Turbulences de brume
derrière un bosquet ;o)
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Retour à l'écurie.




Tout a commencé samedi soir.
Un petit tour sur le web m'apprend que : le soleil se lève à 7H07 demain matin, la journée aéronautique débute à 6H37, et enfin, il devrait faire beau, donc, pas de nuage.
Il n'en faut pas plus pour me décider : demain, je vais assister au lever du soleil d'en haut !
Cela faisait un moment que cette idée me trottait dans la tête et le récit de François (penduleux du Mans) l'été dernier m'avait carrément mis l'eau à la bouche. En fait, j'attendais la première occasion pour m'envoyer en l'air au petit matin, moi aussi…
Dimanche, 5H00. Je me lève et file à la fenêtre pour vérifier si la météo ne s'est pas trompée. Les étoiles sont bien au rendez-vous… il va faire beau !
Déjeuner léger et rapide et je file au terrain. Sur la route, je longe la Seine et traverse quelques nappes de brume. Pas très épaisses, mais suffisamment pour que le doute s'installe dans mon esprit.
6H05 : j'arrive au terrain. Il fait nuit noire et la visi est d'une petite centaine de mètres en horizontal. C'est lugubre… En levant la tête, je vois les étoiles et les feux clignotants d'un liner qui va vers Paris, la couche de brume est vraiment mince mais elle risque de m'empêcher de décoller…
Dans la lumière des phares, j'ouvre le hangar et sors mon appareil. J'installe la radio, le GPS, je fais ma prévol tout en surveillant la brume.
6H35 : j'enfile ma combinaison. Je ciel commence à bleuir doucement. Je distingue à peine la manche à air qui pendouille le long de son pylône. Dans le halot des phares, je vois la brume qui tombe. C'est joli mais cela ne fait pas mes affaires…
6H40 : le 503 démarre au premier coup comme d'habitude. Le jour commence à se lever. Je roule vers la piste et la remonte pour m'aligner en 18. La météo annonce du vent du sud… En remontant la piste, ma visière se couvre de buée.
6H45 : je suis aligné. J'ai 600 mètres de piste devant moi mais je vois peut être à 150 mètres. J'estime l'épaisseur de la brume à une dizaine ou une quinzaine de mètre tout au plus. Je vois vraiment bien le ciel, donc, du ciel, je devrais voir la piste !
Comme il me faut environ 70 mètres pour décoller, je décide de tenter le coup. Si jamais je ne suis pas sorti de la brume à mi piste, je coupe tout et me repose.
Allez, ça va bien se passer… je fais un dernier essai moteur et… GAZZZZ !
L'appareil prend de la vitesse. Je surveille les plots jaunes qui délimitent la piste pour ne pas me désaxer et je pousse doucement la barre. Les roues quittent le sol. Le palier d'accélération est réduit à sa plus simple expression… il faut que je monte !
Dans la seconde qui suit, mon cerveau reçoit 2 bonnes nouvelles : la première, c'est que je vois devant moi, donc je suis au dessus de la nappe de brume, le seconde, c'est que je vois la piste qui défile en dessous, donc cette couche ne faisait bien que quelques mètres d'épaisseur…
Mon appréhension est dissipée, je réduis le moteur à 6000 tours et je monte en local du terrain.
Le spectacle est magique : je vois pêle-mêle : les lumières de la ville au loin, la fine couche de brume qui enveloppe la vallée avec quelques arbres qui dépassent, le ciel qui prend des tons orangés, annonçant l'arrivée imminente du soleil.
Le vol est non moins magique. Il n'y a pas un souffle d'air. Pendant la montée, je lâche tout et mitraille à tout va avec l'appareil photo. Je me doute que la plupart des clichés seront ratés : il n'y a pas assez de lumière. Je désactive le flash mais cela a pour conséquence d'allonger le temps d'ouverture, donc, les photos risquent d'être floues. La température qui était de 4°C au sol monte rapidement vers 8-9°C.
Arrivé vers 1000 mètres, je m'éloigne vers le plateau à l'est. Il est parfaitement dégagé et en cas de problème, je préfère me poser dans un champ ici plutôt que de tenter un attérro dans la brume sur la piste. Je jette machinalement un coup d'œil au GPS et trouve la vitesse un peu basse. Il y a environ 30 km/h de vent mais il est tellement laminaire que je ne l'avais pas senti.
Tout en montant, je surveille le ciel coté est. C'est magnifique, il a toute une palette de tons de bleu, et les cirrus blancs ont des reflets rouge orangés… Avec la fine pellicule de brume qui couvre le sol par endroit, c'est vraiment un décor irréaliste. Je me délecte, les yeux écarquillés pour ne pas en perdre une miette et laisse mon esprit vagabonder. J'ai une pensée pour Franck qui pleure Nicole, en bas, et pour mon copain Gégé qui est parti trop tôt, lui aussi. Je me rappelle du baptême de pendulaire que je lui avait fait faire. Nous étions allés jusqu'aux Noyers. En descendant, il avait des yeux de gamin émerveillé… Les même que je dois avoir à ce moment précis…
C'est marrant la vie. Le meilleur côtoie souvent le pire, et lorsque tu t'approches de l'un, tu penses à l'autre.
Perdu dans mes pensées, je n'ai même pas remarqué que l'intensité lumineuse était de plus en plus forte à l'est. Le soleil est déjà la. Enfin presque, juste la moitié pour l'instant. Vite, je réduis les gaz et attrape l'appareil photo. Je suis à 1600 mètres et je mitraille à nouveau à tout va. Je me souviens du récit de François, qui avait piqué pour voir le soleil se lever une nouvelle fois. Sans trop y croire, je mets le moteur au ralenti en commence une descente infernale à grands coups de 360, un coup à droite, un coup à gauche. Arrivé à 500 mètres, je me mets en palier et essaie de retrouver l'est… Trop tard, le soleil est toujours au dessus de la ligne d'horizon… Il aurait fallu que je décolle plus tôt pour partir de plus haut… Ce sera pour la prochaine fois…
Bon, il est 7H10 et une question se pose : qu'est ce que je fais maintenant ?
Je n'ai pas envie de redescendre tout de suite. Je suis bien la haut. Je me décide pour les Noyers en espérant que Gaétan soit tombé du lit… Le vent souffle toujours et j'y vais en musardant, tranquille. Je remonte la Seine jusqu'aux Andelys, puis je mets le cap à l'est en direction du terrain. Les bois sont nappés de brume, au loin, vers Etrépagny, je vois un panache de fumée blanche qui émerge de la couche. Je le prends pour guide, c'est presque ma route.
Arrivé aux Noyers, je me pose sur un terrain désert. Je fais la première trace dans la rosée du matin. Un jour il faudra que j'aille me poser sur un glacier, faire la première trace dans la neige fraîche. Mais bon, la montagne est encore loin et je dois me satisfaire de mon herbe mouillée pour l'instant !
Il est bientôt 8H00 mais Gaétan n'est pas tombé du lit ce matin… Je ne m'avoue pas vaincu pour autant et me décide pour Saint André. Un coup de ficelle et me voilà à nouveau en l'air. Je fais la course avec un lapin effrayé par le hurlement du 503. Je sais qu'il racontera à Gaétan que je suis passé, ce matin. C'est sympa, la campagne ;o)
Je mets le cap au sud, laisse Vernon sur ma gauche. Je prends un peu de hauteur pour passer la vallée de la Seine, toujours dans la ouate. Deux coups de pédale à la radio pour être sûr que Evreux est fermé, et je fonce sur St André. Enfin, je fonce, façon de parler. Le vent du sud/est se charge de me ralentir mais ce n'est pas grave, c'est dimanche et je ne suis pas pressé.
Sur le plateau d'Evreux, c'est bien dégagé. J'arrive en vue de Saint André. Quelques voitures devant le club avion et des avionneux qui s'activent autour de leur tas de rivets. Ici aussi, je fais la première trace de la journée. 9H00. Pause pipi, je tente un appel sur le GSM de Gaétan mais c'est le répondeur. Ils ont du se coucher tard à St Cyr…
Je décolle un peu déçu de n'avoir pas pu partager mon bonheur et reprends la direction de l'écurie. Cette fois, j'ai le vent dans le dos. Je fais une verticale seuil de piste coté sud à Evreux et je file faire des ronds au dessus de la maison du beau-frère de Jean-Jacques. La non plus il n'y a personne.
En arrivant au terrain, je vois une voiture devant le hangar. C'est Gérard qui sort son pendulaire pour un petit vol matinal. Il me demande où je suis allé.
Comment lui dire que je suis allé réveiller les anges ?
Ce n'est pas facile à raconter en deux mots, ce genre d'expérience…



A Nicole et Gégé,


Xavier