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CONGO : une ONG aide les femmes violées à faire valoir leurs droits

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CONGO: Une ONG aide les femmes violées a faire valoir leurs droits Par Lyne Mikangou

BRAZZAVILLE, 6 mai (IPS) - Plusieurs femmes, victimes de violations sexuelles pendant les guerres civiles survenues au Congo-Brazzaville entre 1997 et 1999, préparent une action en justice avec l'appui de l'organisation non gouvernementale (ONG) Médecins sans frontière (MSF).

Selon les ONG étrangères évoluant au Congo, quelque 3.000 femmes ont été violées durant les guerres civiles a Brazzaville et dans les régions du sud-ouest du pays (Bouenza, Niari, Lekoumou et Kouilou), dont 158 femmes étaient tombées enceintes. Au total, 52 pour cent des victimes étaient des enfants et des adolescentes.

''Pour les victimes mineures, c'est une ouverture très tôt a la vie et elles se livrent à la débauche tandis que pour les femmes mariées, elles risquent le divorce'', affirme la psychologue clinicienne Marie Dominique Cahouet.

Dans un rapport rendu public récemment a Brazzaville, MSF constate que la ''grande majorité des victimes interrogées ne déposent pas de plaintes, ni ne signifient les faits aux services de police''. Cette attitude est adoptée par 64,3 pour cent des femmes alors que 60,3 pour cent n'ont pas porte plainte du fait de l'impossibilité d'identifier leurs agresseurs.

Il s'agit très souvent des femmes victimes de viol collectif par des hommes en armes. Leurs agresseurs étaient complètement inconnus d'elles avant le viol et les circonstances de l'agression dans les forêts, les maisons abandonnées ou les geôles ne leur ont pas permis de les identifier. Dans la plupart des cas, ces agressions ont eu lieu dans des zones où les coupables étaient étrangers.

Selon MSF, cette attitude passive s'explique par le fait que 95,2 pour cent des femmes violées ignorent la procédure de plainte contre X.

''Faute d'information sur la procédure a suivre, par peur pour leur sécurité ou par gêne, la plupart de ces femmes ne veulent pas engager de poursuites judiciaires contre les auteurs des viols'', a dit la directrice des droits humains au ministère congolais de la Justice, Rebecca Oba. Elle encourage les femmes à engager des poursuites judiciaires contre les auteurs des viols.

Selon Oba, la loi sur l'amnistie des faits de guerre, promulguée en décembre 1999 par le président congolais Denis Sassou Nguesso, ne couvre pas les auteurs de viols et violences exercées sur les femmes pendant les guerres civiles.

Cette loi avait été prise pour effacer les faits de guerre et mettre leurs auteurs a l'abri de toute poursuite judiciaire. Pour nombre de Congolais, la loi couvrait les auteurs des viols et de toutes les exactions commises sur les femmes ainsi que les responsables des disparitions de plusieurs centaines de personnes.

''La loi d'amnistie ne prévoit pas l'impunité pour les cas de viol. Toute
personne qui, pour des intérêts personnels, s'est rendue coupable de viols et d'autres exactions durant la guerre, ne bénéficie pas de l'amnistie. Les poursuites sont possibles'', a expliqué Oba qui est également membre de l'Association des femmes juristes du Congo.

''Les poursuites judiciaires sont possibles lorsque la victime a identifie l'auteur'', a-t-elle ajoute, précisant qu'il faut a la plaignante 25.000 francs CFA (environ 35,7 dollars US) pour engager la procédure.

MSF, qui intervient dans le cadre du soutien au programme national d'aide aux Victimes de violences sexuelles (VVS), a déjà entamé des contacts avec les autorités judiciaires congolaises, non sans difficultés.

''C'est un système judiciaire très confus ou il n'y a pas de sessions pour les criminels de ces actes. Il n'est pas complètement mis en place et les sessions de la cour ne sont pas régulières. On encourage des règlements à l'amiable entre la famille du violeur et la police. Donc, c'est un peu tout ça qu'on veut casser'', indique le chef de mission MSF, Philippe Cachet.

Cachet précise que les femmes violées se présenteront au tribunal. ''Nous leur proposons des possibilités pour pouvoir aller en justice le plus rapidement possible''.

Ayant appris l'action de MSF pour la justice, Angele Doko, 19 ans environ, venue pour des soins a l'hôpital, pense que cette ONG en fera encore plus pour les victimes des violences sexuelles. Mais connaissant la lenteur de la justice congolaise, la victime s'insurge.

''Que cette justice se réveille un peu! Si cela n'est pas encore arrive à des proches des agents de justice, qu'ils sachent que ça fait mal. Il faut qu'ils passent aux actes maintenant, qu'ils viennent en aide aux victimes des violences sexuelles'', a lance Doko.

L'action en justice, qui sera engagée, pourrait éclabousser des agents de police ou de l'armée qui se seraient rendus coupables d'actes de viol lors des opérations militaires contre les miliciens ou pendant le rétablissement de l'ordre. La police est souvent accusée de complaisance avec les violeurs.

La plupart des personnes reconnues coupables et écrouées dans les prisons, ont été relâchées juste après. Le choc est bien grave lorsque les deux personnes (la victime et le coupable) se retrouvent dans le même quartier.

Depuis 1999, MSF est présent dans un hôpital de Brazzaville, la capitale, avec un programme de soutien au service d'urgence et de pédiatrie. Le programme VVS découle de ce travail qui, associe a d'autres partenaires, a permis de révéler l'ampleur du viol.

Le nombre des femmes violées est en progression constante depuis l'année 2000 et celui des viols des enfants de moins de 13 ans atteint 45 pour cent lors du dernier trimestre. Sur les 332 cas de viols enregistres par MSF depuis 2000, 178 victimes sont des mineurs.

Selon l'ONG, la majorité des victimes a plus de 18 ans. Pour le mois de janvier 2002, 17 cas de viol ont été enregistrés contre 18 en février de la même année, dont une victime qui est revenue deux fois.

A partir de mars 2000, MSF a élargi la prise en charge médicale en proposant aux victimes une prophylaxie préventive du VIH/SIDA par bithérapie pour celles qui se présentent dans les 72 heures, ainsi qu'une prévention de la grossesse et des infections sexuellement transmissibles (IST). En plus d'une assistance psychologique. (FIN/IPS/AF/HD/LM/AIT/02)


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Dernière modification : 26 novembre 2002