Rapport
fait au nom de la commission spéciale sur le projet
de loi relatif à la bioéthique
Table
ronde sur les greffes d'organes ou de cellules à partir
de donneurs vivants avec la participation de :
M. le Professeur Gérard BENOÎT, Secrétaire
général
de la société française de transplantation,
M. le Professeur Marc-Olivier BITKER, Unité de transplantation
rénale
et pancréatique, Hôpital de la Pitié-Salpêtrière
(Paris),
M. le Professeur Olivier BOILLOT, Unité de transplantation
hépatique, Hôpital Edouard-Herriot (Lyon),
M. le Professeur Jean-Paul COUETIL, Service de chirurgie cardiaque,
Hôpital Bichat (Paris),
M. le Professeur Didier HOUSSIN, Directeur général
de
l'Etablissement français des greffes,
M. le Professeur Henri KREIS, Unité de transplantation
rénale,
Hôpital Necker-Enfants malades (Paris),
M. le Professeur Jean-Paul SOULILLOU, Président du
Conseil scientifique de l'Etablissement français des
greffes,
M. le Professeur Jean-Paul VERNANT, Service d'hématologie
clinique,
Hôpital de la Pitié-Salpêtrière
(Paris),
M. Régis VOLLE, Président de la Fédération
nationale d'aide aux insuffisants rénaux (FNAIR)
(Extrait
du procès-verbal de la séance du 19 décembre
2001)
Présidence
de M. Alain Claeys, rapporteur,
puis de M. Bernard Charles, président
M.
Alain Claeys, rapporteur.
- Mesdames, messieurs, le projet de loi relatif à la
bioéthique prévoit d'élargir la catégorie
des donneurs vivants notamment en ouvrant cette possibilité
aux personnes entretenant avec le receveur des liens étroits
et stables, de nature à garantir le respect des principes
généraux du consentement libre et éclairé
et de la gratuité. Cet élargissement se situe
dans le contexte particulier d'un manque de greffons, ce qui
peut représenter d'ores et déjà un argument
pour le développement des greffes avec donneur vivant.
D'autre
part, il existe dans le monde une grande diversité
concernant la pratique de ce type de greffe. En 1993, aux
Etats-Unis, par exemple, ce type de greffe représentait
40 % du total des greffes. Cette proportion n'était
que de 4 % en France.
Mais
cette pratique divise, semble-t-il, la communauté médicale
et nous sommes là pour en discuter. En effet, pour
certains, le premier des principes médicaux est le
" ne pas nuire ". Comme l'écrit le professeur
Couetil dans la revue Le Courrier de la transplantation, "
Le risque vital et fonctionnel pour le donneur vivant doit
toujours être vivant dans nos préoccupations
et nos décisions, et reste le facteur limitant essentiel
de cette activité de transplantation ".
Il
nous appartient donc d'entendre les différents arguments
en présence. Je remercie mes collègues et nos
invités de participer à cet échange de
vues.
Permettez-moi
de vous présenter rapidement nos intervenants et je
demanderai ensuite à chacun d'eux d'intervenir cinq
minutes avant que nous n'engagions le débat.
M.
le professeur Gérard Benoît est chirurgien transplanteur
au service d'urologie du centre hospitalier universitaire
de Bicêtre et secrétaire général
de la Société française de transplantation.
Il nous présentera les arguments scientifiques et médicaux
qui militent en faveur d'un don d'organes entre personnes
vivantes.
M.
Jean-Paul Soulillou est président du Conseil médical
et scientifique de l'Etablissement français des Greffes.
Il dirige le centre de transplantation rénale de Nantes,
le plus important de France. Il nous fera un état des
lieux du don entre vivants, en termes de donneurs et de receveurs,
quels sont les principaux bénéficiaires du don
d'organe avec donneurs vivants et avec quels résultats.
Puis
nous aborderons les aspects plus spécifiques des greffes
à partir de donneurs vivants, selon les organes greffés.
Nous
entendrons le professeur Bitker, responsable du programme
de transplantation rénale et pancréatique et
coordonnateur de l'enseignement de néphrologie de l'UFR
de la Pitié-Salpêtrière. Il dressera un
état des lieux de la transplantation rénale
en France et abordera l'évaluation des résultats
de cette pratique, les problèmes éthiques qu'elle
soulève, en terminant par des propositions de modifications,
s'il l'estime nécessaire.
M.
Henri Kreis, professeur de néphrologie à l'université
de Paris, est chef du département de transplantation
d'organes à l'hôpital Necker. Il abordera les
aspects particuliers de la transplantation rénale chez
les jeunes enfants et il nous exposera les problèmes
spécifiques liés à cette population.
M.
Olivier Boillot, professeur de chirurgie digestive et responsable
de l'unité fonctionnelle de transplantation hépatique
de l'hôpital Edouard Herriot à Lyon, nous exposera
les caractéristiques de la transplantation hépatique
avec donneur vivant, tant en termes de comparaison avec les
greffes à partir de greffons cadavériques, la
pratique à l'étranger et les perspectives de
cette pratique.
M.
le professeur Jean-Paul Couetil est chirurgien au service
de chirurgie cardio-vasculaire de l'hôpital Bichat-Claude
Bernard et rédacteur en chef de la revue Le Courrier
de la transplantation. Il nous donnera un aperçu de
la transplantation lobaire pulmonaire à partir de donneurs
vivants, ses implications et ses résultats ainsi que
les problèmes éthiques particuliers qu'elle
soulève, compte tenu du taux élevé de
mortalité chez le receveur, 30 % par an. C'est donc
un sujet extrêmement important.
M.
Jean-Paul Vernant, chef du service d'hématologie clinique
du groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière,
est professeur en hématologie. Il nous expliquera les
particularités du recours à la greffe des cellules
souches hématopoïétiques que le projet
de loi prévoit d'insérer dans la catégorie
des tissus et cellules et non plus des organes. C'est là
une modification du projet. L'évolution des techniques
nécessite donc un cadre juridique garantissant la protection
des patients tout en permettant de s'adapter.
M.
Régis Volle, président de la fédération
nationale d'aide aux insuffisants rénaux nous présentera
le point de vue des patients en attente de greffe.
M.
Didier Houssin, directeur général de l'établissement
français des greffes abordera les aspects juridiques
et éthiques liés aux dons en matière
d'incitation, d'information et de consentement. Il nous résumera
les propositions de l'Etablissement français des greffes
pour améliorer la législation.
Je
dois excuser le professeur Cochat, spécialiste de transplantation
rénale chez l'enfant à l'hôpital Edouard
Herriot à Lyon. Il aurait souhaité participer
à notre table ronde mais il nous prie de l'excuser,
n'ayant pu reporter une consultation.
M.
Jean-Michel Dubernard. - Je souhaite m'adresser à mes
confrères pour leur expliquer que depuis dix-huit mois
nous avons eu toute une série d'auditions et d'ailleurs
certains ont déjà été auditionnés
par notre groupe. L'impression que j'ai eue de la part de
mes collègues, parlementaires cette fois, est que les
informations qui leur sont parvenues, soit en faveur soit
contre la transplantation à partir d'organes prélevés
chez le donneur vivant, étaient incomplètes,
pas tout à fait objectives et surtout pas tout à
fait étayées par un raisonnement établi
sur l'expérience d'un certain nombre de groupes.
Je
me sens, étant juge et partie, incapable d'être
objectif ! Mais quand j'ai entendu ce que j'ai entendu sur
les aspects positifs de la transplantation à partir
de donneurs vivants - être greffé sans trop attendre,
avoir des résultats incontestablement supérieurs
- et sur les aspects négatifs - les risques encourus
par le patient, les dérapages potentiels vers le commerce
d'organes ...- j'ai eu l'impression que tout cela n'était
pas tout à fait bien " métabolisé
" par mes collègues députés. Ils
avaient reçu des informations, certes, mais ces informations
n'étaient pas assez complètes et ne reposaient
pas sur un socle solide.
Telles
sont les raisons qui m'ont poussé à demander
à M. Claeys d'organiser cette réunion. C'est
l'état d'esprit dans lequel il faut que vous répondiez,
|