Histoire du Mariage

Mariage en 1920

La déclaration et la demande en mariage

Pour en arriver à cette liberté qui semble naturelle, où l’homme demande directement à la femme aimée de devenir sa compagne, que de chemin parcouru et de retours en arrière ! La liberté de choix des futurs époux est soumise à l’évolution de la condition féminine : plus la femme est libre et considérée, plus l’inclination amoureuse sera respectée.

On ne donne pas sa fille ou son fils à n’importe qui ! On s’informe, on enquête, on choisit des négociateurs pour traiter l’«affaire ». Ceux-ci prennent, à la place des intéressés, le risque d’essuyer un refus. Ils jouent donc un rôle diplomatique entre deux familles, et il en est ainsi dans toutes les civilisations : les familles de la Chine impériale payaient très cher les entremetteurs pour les délicates tractations qui précédaient le mariage, les Mayas faisaient appel à un messager, sorte de « courtier en mariage » qui assistait à la réunion des deux familles et s’occupait des formalités dont la plus importante était de fixer le prix à payer pour épouser la jeune fille.

En Bretagne, ce sont souvent des personnes itinérantes (vagabonds, nomades, mendiants, tailleurs ambulants), au fait de la situation sociale de chaque famille, qui servent d’ambassadeurs.

Dans la France paysanne de l’Ancien Régime, c’est souvent le seigneur qui est chargé, au nom du prétendant, de faire la demande aux parents de celle qu’il espère épouser.

Au début du XXe siècle encore, des intermédiaires - qui servent à la fois d’avocats et de confesseurs - sont chargés de la première démarche. Ils doivent sonder tout en finesse les sentiments des jeunes gens et faire savoir si le projet à l’assentiment ou non de l’intéressé(e). C’est souvent après que la demande en mariage officielle peut être faite.

Fiançailles et droit

Si au cours de leur histoire les fiançailles furent l’objet de préoccupations de l’Eglise, elles sont toujours restées en dehors de la loi. Le Code Civil actuel ne reconnaît pas la valeur des fiançailles, en revanche, il tient compte de la promesse de mariage. S’il y a rupture de fiançailles unilatérale et dommageable, celui qui est en cause de rupture doit réparer. Ainsi, plusieurs jugements rendus font jurisprudence : « Rompre ses fiançailles n’est pas fautif en soi, sauf à un mois du mariage » (29 avril 1981). « Rompre ses fiançailles lorsque la jeune femme est enceinte oblige à verser des dommages et intérêts » (29 avril 1981). Ces dommages et intérêts tentent de réparer le préjudice matériel ou moral dont le fiancé, par son dédit, est l’auteur.

Cependant, la promesse de mariage n’entraîne ni en droit canonique ni en droit français contemporain une obligation juridique de mariage.

La bague de fiançailles

Les usages mondains sont formels ! pour la jeune fiancée pure et vierge (comme il se doit), la bague de fiançailles ne doit comporter que des pierres blanches et des perles, pierres fétiches de la fiancée. Toutefois l’usage à joindre des brillants ou de délicats saphirs. Rubis et émeraudes sont à proscrire. Mais des fiancées de tout temps ont fait fi de ces conseils pour la beauté des pierres et de leurs symboles.

Diamant : fidélité, endurance, loyauté, perfection et éternité de l’amour.
Emeraude : espérance, fidélité, pouvoir régénérateur.
Saphir : force lumineuse et céleste, franchise.
Rubis : passion ardente, beauté, élégance.
Aigue-marine : santé, amour joyeux.
Topaze : amour profond.
Perle : tendresse.
Jaspe : sagesse et constance.
Grenat : loyauté.
Calcédoine : joie, quiétude.

Il y a   longtemps été attribué un pouvoir malfaisant à l’opale et à la turquoise, ce qui explique leur absence au palmarès des pierres de fiançailles.

Le contrat de mariage

Puisque le mariage de deux individus représente, pendant des siècles, l’union de deux familles, il est important, pour chaque époux, de définir exactement quelles sont les conventions pécuniaires qui vont régir leur vie commune : il faut pour cela déterminer l’apport de chacun et le sort de leurs biens de leur vivant ou après leur mort. Jusqu’au XVe siècle environ, les époux sont unis sous le régime dotal, ce qui suppose la séparation des biens ; après cette date, certains couples pourront choisir le régime de la communauté conjugale, s’il est plus favorable à leur situation professionnelle. La rédaction d’un contrat de mariage, pratique de moins en moins répandue de nos jours, était autrefois systématique.

Sous l’Ancien Régime, la signature du contrat se déroule de façon solennelle. En milieu rural, le notaire se déplace au domicile de la fiancée où l’on procède à la signature et l’on offre un repas auquel le notaire est convié. Dans la haute société, elle donne lieu à une véritable événement mondain. Une dizaine de témoins, choisie parmi les plus hautes relations, sont invités à parapher l’acte notarié. Il est d’usage que le roi signe le contrat de son valet de chambre et le seigneur celui de ses paysans.

Les faire-parts

Le traditionnel faire-part remplace en quelque sorte, le heraut d’autrefois ! Pour colporter la bonne nouvelle, on annonce le mariage dans le journal local et on envoie les faire-parts aux invités.

Le faire-part à moins de trois siècles d’existence : il naît dans la première moitié du XVIIIe siècle. Auparavant, on se contente de claironner un peu partout la nouvelle de la noce. Même tardivement dans les campagnes; on invite pas à la noce par écrit, on charge une ou plusieurs personnes de transmettre les invitations.

En Alsace, c’est le fiancé lui-même, accompagné de ses garçons d’honneur, qui parcourt à grand bruit le village sur un cheval orné de rubans, tandis que sa fiancée agit de même entourée de ses demoiselles d’honneur.

En Gascogne, c’est le garçon d’honneur, en Bourgogne, ce sont les deux fiancés qui, ensemble prient à la noce.

Ce mode d’invitation est impossible en ville. Les églises remplissent donc ce rôle d’information auprès de leurs ouailles.

Les cadeaux de mariage

Le mariage c’est le joli temps des présents. Ceux que l’on reçoit et ceux que l’on donne. Les noces marquent un échange de dons et contre-dons entre le marié, la mariée, les parents et les invités. La mariée, héroïne de la fête, est bien entendu au centre de ces échanges. Ces cadeaux sont des présents d’amour, mais sont aussi des dons à valeur symbolique : une promesse sera plus difficile à rompre s’il y a eu échange répété de cadeaux. C’est une façon détournée - et agréable ! - de fixer de manière palpable l’accord oral des deux familles.

Depuis le Moyen Age, les invités apportent des cadeaux aux jeunes mariés pour compléter l’installation de leur ménage. Dans les villages, cela peut être une marmite, un seau, un berceau (mieux vaut être prévoyant!) ou même des cadeaux alimentaires : chapons, oies grasses, vins, jambons. Les parrains et marraines offrent des cadeaux de plus grande importance comme une bassinoire en cuivre ou une soupière en faïence. Dans les familles plus aisées, on donne des pièces d’orfévrerie ou de porcelaine, un objet d’art ou du mobilier.

Dès le début du XXe siècle, les invités regroupent leurs dons en espèces, selon le système de notre liste de mariage, pour faire un plus beau cadeau et ne pas offrir un bibelot quelconque qui risque de finir au fond d’une armoire ou au grenier.

En Bourgogne, la marraine offre à la fiancée une coupe de mariage en argent gravée aux initiales ou au nom de la jeune fille et portant l’année du mariage. Les époux y boivent le jour de leurs noces. On la retendra à la jeune accouchée lors de chaque délivrance. En Vendée et en Bretagne, on fait présent aux fiancés de tasses et de gobelets en étain ou en argent ornés de beaux motifs ciselés.

Les verres de mariage aux initiales des fiancés, entourées de guirlandes de fleurs, tout comme la paire de cruches décorées d’un coeur et marquées aux initiales du couple font également partie des cadeaux traditionnels.

La toilette de noce

Eh oui ! les robes des mariées n’ont pas toujours été blanches ! Aujourd’hui encore, se marier en robe de couleur semble choquant à certaines personnes et pourtant, la tradition de la robe immaculée est récente : il faut attendre le XIXe siècle pour qu’apparaisse enfin cette fameuse robe blanche qui nous semble immémoriale. En fait, la robe de mariée s’est colorée de mille teintes en fil des siècles, tout en suivant de très près la mode vestimentaire de l’époque. Etre la plus belle étant le seul impératif de la jeune mariée, il fallait, pour cette occasion unique, sortir de l’armoire ses plus beaux atours ou bien se faire confectionner une nouvelle robe par la couturière.

Les premières robes de mariée blanches, ornées d’un long voile, apparaissent autour de 1830.

Couronne de fleurs, bouquet de la mariée, décor floral... Les fleurs bordent le chemin des mariés. Honneur à la fleur d’oranger qui est la fleur du mariage par excellence. C’est une coutume française ; l’impératrice Eugénie en 1853 porte une petite couronne de leurs d’oranger, mariées avec les saphirs de sa couronne. Aux Etats-Unis et en Angleterre, on porte alors des roses blanches dans les cheveux.

Mariée en 1920

Grand succès également pour le romarin. Au Moyen Age, on lui attribuait la propriété d’affermir la mémoire ; aussi en a-t-on fait un symbole de la fidélité. A l’occasion des mariages, on tapissait le sol avec des branches de romarin.

Le bouquet de la mariée a été ajouté aux festivités au cours du XIXe siècle. Il regroupe souvent des fleurs blanches -lis, fleur mariale par excellence, freesias, renoncules, petites roses anciennes.

Le mariage religieux

Le rituel du mariage s’est répandu en France autour du XIe siècle. On le trouve décrit dans un concile tenu à Rouen en 1072. Quarante jours après l’engagement solennel des fiançailles, les mariages ont lieu de fort bon matin (5 ou 6 heures), alors que les fiancés sont à jeun. Ils se déroulent en public, comprennent l’échange des consentements, la remise de l’anneau, la bénédiction nuptiale donnée par un prêtre, puis la messe.

Le cortège se rend à l’église au son des flûtes et des tambours où le prêtre de la paroisse les accueille sous le porche.

Sous l’Ancien Régime, les mariages de nuit sont fréquents. Ils ont pour raison d’obscures frayeurs populaires : celle du diable. En bénissant de nuit les fiancés, on pensait conjurer le sort, empêcher l’impuissance et la frigidité.

« Mariage pluvieux, mariage heureux », dit-on. Et lorsqu’il ne pleut pas, on asperge les jeunes époux d’une joyeuse pluie de grains. Cette coutume existait déjà dans la Chine ancienne. En Asie où il représente la nourriture essentielle, et en occident, le riz symbolise la richesse, l’abondance. C’est pour cette raison que l’on jette des poignées de riz sur les jeunes couples en signe de bonheur et de fécondité.

Si la coutume de l’anneau de fiançailles remonte à l’Antiquité romaine, les conditions et la date d’apparition de l’anneau de mariage sont assez obscures. Jusqu’au XIe siècle, l’anneau est symbole de fiançailles plutôt que de mariage. Seule la femme le porte puisqu’il symbolise les arrhes du mariage, les obligations matérielles du futur époux. Lorsque la cérémonie des fiançailles se confond dans la pratique avec celle du mariage, le rite de l’anneau passe de l’une à l’autre et change de sens : il signifie désormais promesse et gage de fidélité et, comme l’engagement concerne aussi bien l’homme que la femme, on en vient naturellement à l’usage de deux anneaux.

En France, pays catholique qui, jusqu’à la Révolution admet uniquement le mariage religieux, les protestants ont eu beaucoup de difficultés à faire reconnaître des unions légitimes. Un édit fut promulgué en 1787, applicable par les protestants comme pour les Israélites. Les non-catholiques devaient faire précéder leur mariage d’une publication de bans et l’union célébrée devant un curé ou devant un juge royal. Mais pour décourager ces unions très peu catholiques on faisait payer une taxe plus importante à ceux qui convolaient devant le juge royal.

Les témoins

La loi du 20 septembre 1792 prescrit que les témoins, au nombre de deux ou de quatre, doivent avoir vingt et un ans révolus et peuvent être, grande première, du sexe féminin.

La fête de mariage

Divertissements et mondanités représentent le côté profane de la cérémonie de mariage. Ce qui ni signifie pas que cet aspect du mariage soit boudé. Bien au contraire ! C’est même souvent l’une des principales raisons du mariage en cette fin du XXe siècle : on se marie pour faire la fête ! Transformer cette journée en événement exceptionnel, quitte à y engloutir une partie de sa fortune ou de sa dot, a toujours semblé naturel aux différentes classes de la société. La fête aura plus ou moins d’éclat et sera plus ou moins longue selon la fortune de la famille. Les mariages dans les campagnes s’étalent sur plusieurs jours, ceux des jeunes filles nobles sont prétextes à d’incroyables fêtes qui durent parfois plus de dix jours.

A toute époque, la festivité la plus courante lors des mariages est la danse. Dans les villages on fait la fête pendant plusieurs jours; Tous les habitants du village sont conviés et le clocher sonne à toute volée le début de la noce. Après la cérémonie religieuse, le cortège accompagné des musiciens se promène dans tout le village. Après les longs travaux des champs, les couples se laissent entraîner par la frénésie de la danse, grisés par le vin, joyeux de rire; bavardent gaiement et entament une farandole.

Le gâteau de mariage

Depuis l’Antiquité, le gâteau que l’on partage entre tous les invités est un des mets traditionnels de la noce. On le trouve généralement sous la forme d’une pièce montée ou de gâteaux superposés surmontés de colombes en sucre ou de figurines représentant les époux.

Souvenirs, souvenirs,

Presque toutes les familles avaient, à la campagne, une cloche de verre épais où la mariée déposait précautionneusement, au lendemain de la noce, sa couronne tressée de fleurs d’oranger. A côté de la couronne séchant doucement à l’abri de la poussière, la jeune femme ajoutait, au gré des années des souvenirs de baptêmes d’enfants, d’anniversaires, etc. Toute la vie de l’épouse pouvait être résumée par les objets contenus sous le globe dont la couronne formait le premier maillon.

Mariage en 1919 dans le Lot et Garonne

 

Extrait de :
L’histoire du mariage de Sabine Jeannin Da Costa
Editions de La Martinière
Illustrations : Photos de famille de Nicole Bourrée