La région d'Autrêches a été très touchée par les 2 guerres. Il nous reste,
pour en témoigner, quelques gravures et inscriptions dans les carrières, dans
certaines caves et sur des anciennes maisons qui ont survécu aux bombardements.
Autrêches, pendant la guerre 1914-1918, se trouvait juste sur la ligne entre
les Allemands et les Français. C'était la guerre de "position" et non plus la
guerre de "mouvement". Certaines tranchées et cagnas sont encore visibles.
LE COMMENCEMENT :
La cause initiale de la guerre mondiale que les Empires Centraux déchaînèrent en
1914 fut la folle ambition de l’Allemagne qui prétendait à la domination
universelle.
Dans son esprit, la France, par suite d’amputation de territoires, de la ruine
de son Commerce et de son industrie, devenait une nation secondaire asservie ;
la Belgique se trouvait être un bastion allemand ; l’Angleterre devait être
dépossédée de sa maîtrise des mers ; la Russie, à qui l’on enlevait la Pologne
et les provinces Baltiques, serait amoindrie et rejetée vers l’Orient, et
L’Allemagne, avec son alliée l’Autriche-Hongrie, suzeraine de la Turquie,
règnerait en maîtresse souveraine de Hambourg à Bagdad et de la Mer du Nord au
Golfe Persique.
Pour réaliser ce plan, il fallait une Guerre et le prétexte de cette guerre fut
trouvé dans l’assassinat à Sarajevo, le 28 juin 1914, de l’Archiduc Héritier
d’Autriche, François Ferdinand.
Le 23 juillet 1914, l’Autriche adressa aux Serbes un ultimatum humiliant dont,
sur les conseils de la Russie et de la France, toutes les conditions furent
acceptées. Les ministres autrichiens se montrèrent intransigeants et l’empereur
de Russie, par précaution, fit mobiliser sur la frontière Austro-Hongroises. Le
kaiser Guillaume II somma le tsar Nicolas II de revenir sur cette mesure.
L’Autriche paraissait prête à transiger quand l’Allemagne, résolue à la guerre,
brusqua le dénouement.
Après avoir rejeté :
1) la proposition anglaise de soumettre le différend à une conférence ;
2) la proposition française de constituer une commission internationale ;
L’Autriche refusa l’arbitrage de Nicolas II et le 28 juillet 1914, elle déclara
la guerre à la Serbie.
Le 31 juillet 1914, l’Allemagne adressait un ultimatum à la Russie et à la
France. Le 1er août, elle déclarait la guerre à la Russie et le 3 août à la
France.
A son tour, le 4 août 1914 devant l’attitude de l’Allemagne qui déclarait «
chiffon de papier » le traité de garantie par lequel la Prusse garantissait la
neutralité de la Belgique, l’Angleterre déclarait la guerre à l’Allemagne.
LA MOBILISATION :
Dès le 2 août, lorsque l’ordre de mobilisation générale fut affiché et publié
dans toutes les communes de France, tous les citoyens en état de porter les
armes obéirent à l’ordre d’appel de la Patrie et, suivant les indications que
portait leur ordre individuel de mobilisation, se rendaient aux endroits
assignés.
A Autrêches, personne ne défaillit et tous les hommes mobilisables rejoignirent
leur dépôt. L’armée active comptait parmi ses soldats, plusieurs jeunes hommes
du village.
Les premières journées de stupeur et d’adieu passées, la population se remit au
travail quotidien, amputée de ses aides les plus forts et y remédiant par
l’emploi des femmes, des vieillards et des enfants qui restaient.
Chaque jour, les journaux étaient impatiemment attendus et les nouvelles très
optimistes qu’ils renfermaient faisaient prendre l’absence en patience ; mais
brusquement, alors que l’on croyait à la victoire prochaine, on apprenait que de
la Somme aux Vosges notre front était stationnaire ; l’ennemi était donc en
France et non loin de notre village.
Et bientôt, l’exode des habitants des régions déjà envahies ajoutait foi aux
communiqués officiels, et, le 30 août 1914, le 3e Corps Allemand, commandé par
le général Von Lochow, qui était allé porter secours à Roye le 30 août 1914 au
général Von Bulow, passait l’Aisne à Vic-Sur-Aisne le 1er septembre 1914, venant
de Noyon et allant vers Villers-Cotterêts.
LES EVENEMENTS A AUTRECHES
Il livrait des combats à l’arrière garde de l’armée anglaise qui, en se
retirant, était passée à Autrêches.
Cependant, le 6 septembre, le généralissime Joffre lançait son ordre du jour
resté célèbre et que je veux rappeler ici pour montrer la confiance en la
victoire que tous avaient déjà.
Cet ordre du jour était ainsi rédigé :
« Au moment où s’engage une bataille d’où dépend le salut du pays, il importe de
rappeler à tous que le moment n’est plus de regarder en arrière. Tous les
efforts doivent être employés à refouler l’ennemi. Une troupe qui ne peut plus
avancer devra coûte que coûte garder le terrain conquis, et se faire tuer sur
place plutôt que de reculer. «
De cet ordre est née la bataille de la Marne qui fut une grande victoire pour
nos armes. A dater de ce moment l’ennemi commence à refluer de toutes parts du
front et, en ce qui concerne notre village, nous allons bientôt y voir la
bataille.
Le 11 septembre 1914, le 35e Régiment d’Infanterie atteint Vivières, et le 12,
après avoir enlevé la ferme de Pouy et la râperie, il déborde Courtieux et
s’empare de la crête fortement organisée du Chatelet. Le même jour, ce régiment
force le passage de l’Aisne à Vic-sur-Aisne. Le 13 septembre, le 35e R.I.
s’étant emparé de la ferme de Chapeaumont se porte sur Saint-Christophe et
Hautebraye ; le hameau de Chevillecourt qu’il atteint marque la limite de
l’effort sublime qui sauva la France, immortalisé sous le nom de la Victoire de
la Marne.
En même temps, le 42e R.I. par Saint-Christophe et Sacy concourt à la bataille
d’Autrêches ; le 3 septembre, il est envoyé en flanc garde sur Bonval et
Mouflaye, et l’artillerie allemande est très active sur le plateau Croix Sainte
Léocarde Mouflaye. La ferme de Mouflaye est incendiée ce jour.
Conformément aux ordres reçus, le 14 septembre, la 14e division d’infanterie
attaque et la 28e brigade a pour objectif le plateau nord de Chevillecourt
Autrêches. Le 42e R.I. par les pentes du ravin Est de la ferme Saint-Victor
arrive facilement à Autrêches et au Bout de Vaux et enfin à la corne des bois,
vers la côte 141 (croisement des chemins allant du Bout de Vaux à la grange des
Moines avec la chaussée Brunehaut). Mais n’étant plus appuyé à gauche par la 61e
Division d’Infanterie à Autrêches et sur la lisière Nord du village. Une
contre-attaque ennemie sur Massenancourt échoue complètement.
Le même jour, le 60e R.I. placé en soutien d’artillerie sur le plateau et dans
le ravin de Bonval, subit de violents combats et a 4 tués, 124 blessés et 57
disparus. Dans la soirée du 14 septembre, une forte reconnaissance se dirige
vers la ferme Saint-Victor ; la ferme est occupé par nous, mais à la faveur de
la nuit, les Allemands y mettent le feu et le régiment se replie sur Hautebraye.
Toujours à la même date, le 44e R.I. livre des combats incessants avec des
alternatives d’avance et de recul pour la possession des ravins du Baut de Vaux
et d’Autrêches : dans la nuit du 13 au 14 septembre, le 1er Bataillon de ce
régiment, complètement cerné et séparé de son corps, réussit à rejeter l’ennemi.
Le 219e R.I. a également sa page de gloire dans les combats d’Autrêches qu’il
livre les 14 et 15 septembre entre Bitry et Autrêches.
Le 15 septembre, le 60e R.I. par une nouvelle poussée, pénètre aux abords d’Autrêches
que les allemands occupent. Ses 2e et 3e Bataillons occupent respectivement
Massenancourt et Chevillecourt. Le 308e R.I. en concordance avec le 42e R.I.
attaque les positions allemandes du Tiolet, la progression est enrayée par le
feu ennemi et coûte 15 tués et 133 blessés ou disparus. Pendant ce temps, le
219e R.I. entre Moulin Sous Touvent et Autrêches, attaque également avec
beaucoup de pertes. Le 18 septembre, le 42e R.I. cherche à déboucher vainement
sur le plateau 141 – 151, c'est-à-dire entre le croisement de la chaussée
Brunehaut et la route de Noyon, et le croisement chaussée Brunehaut-Grange des
Moines. Ce régiment reste terré dans les trous individuels, embryon de
tranchées, jusqu’au 17 septembre date à laquelle il est relevé par le 44e R.I..
Le 18 septembre, le 35e R.I. vient remplacer le 60e R.I. qui va se reposer à
Hautebraye et au Moulin d’Hautebraye. A cette date, les français occupent donc
le Bout de Vaux, Massenancourt et Chevillecourt. Le 19 septembre, quand le 60e
R.I. vient reprendre ses positions de la veille, il se trouve face à face aux
Allemands, le bataillon du 35e R.I. ayant été fait prisonnier. Un violent combat
s’engage et l’on occupe de nouveau Autrêches, Massenancourt et Chevillecourt.
Le 20 septembre, au petit jour, les Allemands avec deux divisions fraîches,
attaquent, chevillecourt est défendu maison par maison par le 335e R.I. qui perd
son 2e Bataillon lequel cerné, décimé est capturé après une résistance
désespérée. Le 60e R.I. se replie sur Hautebraye et a 49 tués et 289 disparus.
Ce même jour, à Sainte Léocade, le 44e R.I. est surpris en pleine relève par les
Allemands. Ses unités, un instant débordées, se ressaisissent et reprennent pied
sur le plateau où elles s’établissent solidement suivant les ordres reçus.
Subissant des pertes considérables, le 42e R.I. se replie au-delà d’Autrêches et
de Chevillecourt et se rassemble au nord d’Hautebraye.
Les allemands tiennent donc maintenant la partie du terroir située entre la
Croix Sainte Léocade, la Justice, la Montagne Blanche, Chevillecourt et Nouvron.
Le 23 septembre, à 4 heures du matin, le 42e R.I. part à l’attaque, atteint le
rû d’Ozier, s’y cramponne mais n’étant pas soutenu par les unités voisines, ne
peut progresser davantage.
Le 25 septembre, le 1er bataillon du 42e R.I. s’organise, et profiant d’un
chemin creux, depuis le pont Est de Chevillecourt (pont de Ponfard), il crée,
jusqu’au plateau 150 (plateau de Nouvron) des tranchées profondes. Ce même jour,
à 20 h 30, les Allemands, aidés d’un violent bombardement lancent une attaque ;
mais arrêtés par nos feux, ils se retirent derrière le rû d’Ozier.
La collaboration avec le 42e R.I.n le 354e R.I. prend part à l’attaque d’Autrêches,
position jalousement gardée pat l’ennemi. A grand peine, sous un feu terrible,
il aborde le village. Chaque maison est une redoute quq’il faut assiéger sous le
tir de mitrailleuses masquées de tous côtés. Dans ces corps à corps, chacun
redouble de courage. De son côté, l’Allemand déploie sa bassesse ; pour enrayer
notre avancé, pour tirer, il va jusqu’à s’abriter derrière des femmes et des
enfants.
Le 24 septembre, ce régiment très éprouvé, est mis en réserve à Vic-sur-Aisne.
Le 25 septembre, le 66e bataillon de Chasseurs à pied entre en secteur à
Hautebraye.
Le 26 septembre, le 6e bataillon du 354e R.I. est envoyé par
Saint-Pierre-le-Bitry sur le plateau de Sainte-Léocade, à la disposition du
colonel de Mac Mahon pour parer à un retour offensif de l’ennemi venant d’Autrêches
et de Moulin-sous-Touvent.
Vers cette époque, le front en cette partie se stabilise de part et d’autre ;
des retranchements sont creusés par chacun des belligérants et la guerre de
tranchées succède à la guerre de mouvement.
Les unités moins nombreuses tiendront des secteurs plus étendus et les actions
se réduiront à des offensives ou des attaques purement locales.
Le 2 octobre, le 219e R.I. prend un secteur de tranchées à cheval sur la route
de Moulins-sous-Touvent et l’occupe jusqu’au 17 décembre.
Le 45e bataillon de chasseurs à pied, parvenu à s’emparer de Vingré et des
hauteurs voisines, se trouve arrêté devant le village de Chevillecourt occupé
part l’ennemi.
Le 20 septembre, il était de réserve à Hautebraye.
Le 25, avec le 1er bataillon du 42e R.I., il attaque Chevillecourt et occupe les
premières maisons.
Le 27 septembre, il s’empare du moulin de Chevillecourt (Ponfard) ; le 28, il
organise la position et pose des fils de fer.
Le 29 septembre, il occupe, par sa 8e compagnie, les tranchées sur le plateau à
l’est d’Hautebraye. Chevillecourt étant occupé par l’ennemi, gênait la
progression des chasseurs et il était important de s’en emparer. L’ordre en est
donné le 1er octobre ; Vers 18 heures, la 9e compagnie du 45e B.C.P. reçoit
l’ordre d’aller voir si le pays est toujours tenu par les Allemands.
Entre les deux fronts : un pont. De chaque côté du pont des marécages. On fait
route d’abord dans le chemin creux connu, puis les chasseurs suivent lentement,
dans le plus grand silence, le chemin droit qui conduit à la première maison du
village. La patrouille de tête arrive à 6 mètres de ladite maison. Tout à coup,
la fusillade commence : de chaque mètre carré de cette maudite maison qui
commande le pont et la route (maison de M. Majeux) partent des coups de feu. A
droite, un mur crénelé : à gauche, des défenses artificielles abritent des
mitrailleuses. Devant l’intensité du feu ennemi, la compagnie dut se retirer,
ayant eu quelques pertes.
La guerre de tranchées s’organise et la lutte, peut-être plus terrible et plus
sanglante que la guerre de mouvement, continue âprement pour disputer avec
acharnement une position plus avantageuse, pour reprendre un élément de tranchée
perdu.
Diverses unités se succèdent en secteur et nous voyons, le 30 octobre 1914, le
60 R.I. reprendre la ferme de Saint-Victor pour soulager, par son action, le
front dans la région de Vailly où l’ennemi s’agite fortement.
Quelques jours plus tard, alors que le calme était rétabli, le 12 novembre 1914,
le 60e R.I., en collaboration avec le 44e R.I. reçoit l’ordre de progresser à
l’est de Saint-Victor, en amont de Sainte-Léocade. A 8 heures du matin,
l’attaque a lieu, mais l’élan est brisé, dès l’apparition de vague d’assaut, par
le feu intense des Allemands. Le même jour, à 14h 45, ces mêmes régiments
recommencent l’assaut qui est à nouveau arrêté. Cette affaire nous fait perdre
26 tués, 103 blessés, 156 disparus. Le 60e R.I. est relevé le 13 décembre 1914
par le 170e R.I. qui se trouve déjà dans le secteur de Vic-sur-Aisne depuis le 4
novembre1914. A peu près vers la même date apparaît un autre régiment, un
régiment de territoriaux : le 54e R.I.T. Ces pépères font vaillamment leur
devoir et tiennent stoïquement dans ce secteur agité. Le 2e bataillon de ce
régiment remplace le 170e T.I. devant Autrêches où une certaine agitation règne
sur le front provoquée par les violents combats qui se livrent autour de
Soissons et de Crouy. Le 17 janvier 1915, sur le rond-point de l’Etoile
(croisement des routes d’Hautebraye à Autrêches, avec allée venant de
Chevillecourt (La folie à Autrêches), sur un petit poste d’écoute occupé par la
6e compagnie, les Allemands tentent un coup de main ; appuyés par le feu de
plusieurs mitrailleuses, ils surprennent et tuent quatre hommes de faction et
parviennent jusqu’à la tranchée.
Mais l’alerte est déjà donnée à Vic et même au-delà. Le téléphone ne cesse de
retentir et des nouvelles les plus contradictoires circulent et s’amplifient. Un
instant, on crut à l’arrière que les Allemands avaient percé notre front. En
somme, cette grosse affaire se réduisait à la prise momentanée d’une antenne
avancée ; longue de 10 mètres et large de 80 centimètres au plus. Il faut
ajouter que sur ce point, les lignes n’étaient distantes que d’une dizaine de
mètres. Cependant, de part et d’autre, les fronts s’énervaient et l’action,
s’étendant, gagnait les secteurs voisins. L’artillerie s’en mêlait, tirant de
toutes ses pièces. On crut devoir reprendre le poste d’écoute et on fit monter
des renforts, spécialement des sapeurs du génie munis d’explosifs. Après une
nuit mouvementée, on arrachait à l’ennemi sa conquête d’un jour en lui
infligeant des pertes qui durent être sérieuses, vu les moyens d’action
employés. Ce régiment, par la suite, transforma en véritable forteresse blindée
la ferme de Mouflaye.
Le 352e R.I. du 7 février au 18 juillet 1915, dans les secteurs de
Vic-sur-Aisne, Hautebraye, Autrêches, Sacy, Chevillecourt, le bois de Morsain,
va mener également, durant cette longue période, la vie de secteur, avec les
fatigues, les surprises et les bombardements.
Le 5 juillet 1915, le 55e B.C.P. relève dans le secteur d’Hautebraye un
bataillon du 352e R.I.
Le 22 juillet 1915, le 55e B.C.P. est relevé lui-même dans le même secteur par
le 45e B.C.P ; qui a, pendant cette période, 132 tués, ce qui montre combien
notre village était meurtrier par nos braves soldats qui l’assiégeaient.
Pendant l’année 1915, de fin mai jusqu’à fin avril 1916 le 404e R.I. ne cesse de
prendre les tranchées dans les secteurs de Moulins-sous-touvent, Autrêches,
Nouvron, Vingré. L’année 1916 voit également les mêmes luttes, les mêmes
dénouements que pendant 1915 et les régiments se succèdent les uns aux autres.
Du 10 décembre 1915 au 20 janvier 1916, le 224e R.I. vient en secteur devant
Autrêches, et, à la même époque, le 262e R.I. lutte quotidiennement et pers de
nombreux braves dans les secteurs de Saint-Christophe, Autrêches et Vingré.
Le 205e R.I. est du 12 décembre 1915 au 20 janvier 1916 en tranchées dans les
mêmes endroits cités précédemment. La première bataille de Verdun allait avoir
sa répercussion sur les autres champs de bataille du front français. De même que
les Allemands, l’Etat-Major français allait retirer la plus grande partie de ses
troupes actives pour les jeter dans la fournaise et les remplacer par des
troupes aussi tenaces, mais plus calmes : les territoriaux..
Le 14e R.I.T. vient donc à Autrêches dans le courant de mars et occupe l’Etoile
Madame où il subit d’intenses bombardements, d’autant plus dangereux que ce sont
des obus à gaz qui sont lancés.
A partir du 15 mars 1916, le 38e R.I. vient en secteur aux environs de
Moulin-sous-touvent. Le poste de Libertud et la ferme Saint-Victor sont souvent
le théâtre d’escarmouches et de coups de mains. Le régiment reste plusieurs mois
en ces parages. Des cavaliers du 3e régiment de chasseurs à cheval concourent à
la défense d’Autrêches ; arrivés en place le 7 mai 1916, ils ne quitteront le
secteur qu’en novembre 1916.
Le secteur d’Hautebraye qui termine le plateau dénudé de Moulin-sous-touvent a
laissé des souvenirs que n’oublieront pas les chasseurs ; ils se souviendront du
Mont des Carpathes que l’artillerie ennemie retourna sans cesse.
Du 10 mai au 11 décembre 1916, le 417e R.I. vient en faction alternativement,
soit à Quennevières, soit à Autrêches. Le 16 juin, son 2e bataillon est appelé
pour parer à une puissante attaque ennemie ; Soixante-trois des siens sont
tombés dans les ravins marécageux de Bonval et sur les pentes boisés d’Hautebraye.
Le 319e R.I. vient tenir le front entre Bitry et Autrêches. Il reste en ce lieu
du 28 août 1916 jusqu’au 13 décembre 1916. Le 44e B.C.P. transporté dans
l’Aisne, prend, le 12 décembre les tranchées dans le secteur de
Bonval-Hautebraye ; c’est là qu’il passe tout l’hiver.
Le 42e B.C.P., du 12 décembre 1916 au 5 janvier 1917 travaille à l’organisation
défensive du secteur d’Hautebraye ; jusqu’au 8 mars, il occupe ce secteur,
alternant avec les premières lignes et les positions de réserve. L’artillerie
ennemie est très active : de fréquents coups de mains sont exécutés de part et
d’autre et les pertes sont assez sérieuses.
Le 269e R.I. et le 44e B.C.P. sont en ligne à Autrêches, quand, le 17 mars 1917,
dans la nuit, l’ennemi se replie sur des positions situées bien en arrière
(ligne Hindenburg) et le 19 mars 1917, par Vassens et Saint-Aubin, ils
s’établissent sur la troisième position adverse et l’organisent.
Autrêches est donc délivré.
La liberté relative dont jouissait la nouvelle zone des armées, et dont
Autrêches faisait partie, ne dura qu’un peu plus d’un an, exactement 439 jours.
Le 4e régiment d’infanterie, pendant les journées des 29, 30 et 31 mai 1918 bat
en retraite de saint-Paul-au-bois vers Autrêches ; en même temps, le 71e R.I.
pendant la nuit du 30 au 31 mai se porte sur des positions solides. Par Vassens,
Chevillecourt, il gagne la région de Vingré, Berry, Saint-Christophe et prend
position sur la côte 150 (Croix Moreau). Le 30 mai, le poste de commandement du
colonel commandant le 264e R.I. est ay Bout-de-Vaux à 19 h 40. Le 31 mai, le
régiment est en position entre le chemin Audignicourt, Autrêches exclus, et le
sentier de Vezins inclus. L’ennemi s’infiltre en assez grand nombre dans les
ravins d’Audignicourt et de la Grange-des-Moines. Des tirs demandés à
l’artillerie sur ces objectifs ont été exécutés, mais le tir est pu fréquent et
peu nourri, malgré notre demande répétée de barrage (au total 7 tués, 52
blessés).
Le 1e juin 1918, l’ennemi continue sa pression, mais la résistance des 3e et 4e
bataillons retarde son avance. Le commandant du 6e bataillon est présumé blessé
et prisonnier dans Autrêches, ainsi qu’une partie de sa liaison. Ce régiment a 2
tués, 18 blessés et 208 disparus. Dans la matinée du 1er juin 1918, la 11e
compagnie du 11e cuirassiers à pied reste en ligne. Lorsque la ferme du Thiolet
tombe aux mains de l’ennemi, la résistance devient impossible ; la plue grande
partie du régiment n’a qu’un cheminement pour s’écouler. Le boyau de la
Couleuvre est arrosé par l’artillerie et pris d’enfilade par les mitrailleuses.
La 11e compagnie est presque entourée ; son chef a reconnu l’entrée d’une creute
; il y dirige son unité et, une boussole à la main, éclairé d’une lampe
électrique, il guide ses hommes entre les piliers de pierre à la recherche d’une
issue vers le sud. On aperçoit une issue que l’ennemi n’occupe pas encore ;
c’est le salut.
La 11e compagnie rejoint Bonval par Autrêches où est son régiment. (Cette
compagnie était entrée dans les carrières de Vesins et était sortie par celles
des Fossés-Gaudriers ou de la Carrière-Neuve)
Pendant la nuit, le 11e cuirassiers à pied reste à la disposition du 48e R.I. et
met en lignes deux compagnies entre la chaussée Brunehaut (c’est-à-dire la route
de Noyon) et Mouflaye.
Le 2 juin, la situation reste la même. A 12h 30, le 2e bataillon du 246e R.I.,
se porte vers la Croix Sainte-Léocade et contre-attaque l’ennemi qui s’est
infiltré dans ces parages. Cette opération coûte à ce bataillon 12 rués, 24
blessés et 14 disparus.
Le 4 juin, le bombardement par 77 et 105 est intense ; vers 18 h 30, le Boches
sont vus sortant de leurs tranchées par paquets et se dirigeant vers Bonval.
Nous les repoussons ce qui nous coûte 5 tués et 7 blessés.
Du 5 juin au 1er juillet, pour ce régiment, la situation est presque sans
changement ; les tirs d’artillerie sont réciproques.
Le 3 et le 4 juin, le recul est complètement arrêté et les Allemands à
Saint-Victor épient nos mouvements.
Le 5 juin 1918, le 3e bataillon du 70e R.I. s’empare d’HAutebraye et capture 91
prisonniers dont 4 officiers et prend de nombreuses mitrailleuses.
Le 9 juin, une nouvelle attaque menée par les 1er, 5e et 7e compagnies du même
régiment ramène les Allemands sur Chevillecourt où elles font 182 prisonniers et
prennent 12 mitrailleuses. La situation est sans changement jusqu’au 17 juin. A
cette date, le 48e R.I. et le 71e R.I. attaquent. Le 48e R.I. a pour objectifs
les deux observatoires allemands : Saint-Victor et la croupe nord d’Hautebraye.
Le 1er bataillon atteint facilement Saint-Victor malgré des pertes sévères.
Le 3e bataillon atteint un peu plus difficilement son objectif : le côté nord d’Hautebraye,
car la profondeur de son attaque est plus considérable.
Le 2e bataillon progressait sans difficulté dans la trouée de Chevillecourt,
assurant la continuité de notre nouvelle ligne.
Cette opération coûtait à ce régiment : 3 officiers tués, 19 hommes tués et 88
blessés.
Le 71e R.I. envoyait le même jour aux environs de Sacy son 3e bataillon en
soutien des 70e et 48e R.I. qui attaquent au nord d’Hautebraye et la position à
l’ouest d’Autrêches.
Pendant ce temps, le 1er bataillon du 70e R.I. profitant de l’attaque faite par
le 48e R.I. et de sa propre initiative, chasse les Allemands des derniers points
où ils étaient accrochés sur la croupe d’Hautebraye. Le 18 juin, le 71e R.I. est
relevé par le 48e R.I.
Le calme relatif allait régner momentanément sur notre pays : ce n’était qu’un
repos passager permettant la préparation d’une nouvelle opération. En effet, le
3 juillet 1918 une attaque doit avoir lieu.
Le 2 juillet, le 246e R.I. se prépare à l’action. Le 3 juillet, à 19h 35, le 71e
R.I. en liaison avec la 55e D.I. à gauche, avec le 48e R.I. à droite, attaque la
première ligne allemande entre Autrêches et la Chaussée Brunehaut (route de
Noyon). Le 2e bataillon atteint tous ses objectifs : il a fait plus de 200
prisonnier et n’a que 2 tués et 9 blessés.
Le 2e bataillon du 48e R.I. attaque de concert avec la 55e D.I. pour s’assurer
la possession de tout le plateau situé à l’ouest d’Autrêches. Commencée à 19h
15, l’attaque réussit à 20h 30 tous les objectifs sont atteints. La division
marocaine, le même jour, avec le 30e C.A. participe à cette opération de la
région d’Autrêches.
De son côté, le 246e R.I. fait 250 prisonniers et prend 6 mitrailleuses.
Le 71e R.I. reste en ligne dans notre pays jusqu’au 14 juillet : il est relevé
par le 246e R.I. qui occupe les positions devant le Bout-de-Vaux, Beaumontoir et
Autrêches : il est à son tour remplacé par les 168e et 169e R.I.
A peine reconstitué, après des combats meurtriers, le 169e R.I. reçoit l’ordre
de prendre un secteur dans la région d’Autrêches en vue d’une attaque qui, menée
sur une grande profondeur, devait le conduire à 20 kilomètres de son point de
départ.
Dans la nuit du 31 juillet au 1er août, le 167e R.I. relevait le 327e R.I. dans
le secteur nord de Vic-sur-Aisne.
Les lignes passaient alors par Nouvron-Vingré, s’accrochaient au plateau de
Saint-Christophe, descendaient vers le rû d’Ozier, couraient le long des
lisières sud de Chevillecourt, au nord d’Autrêches et continuaient dans la
direction de Moulins-sous-Touvent.
Du 2 au 16 août, le régiment chargé de tenir les lignes face à Chevillecourt et
de la partie ouest du plateau de Nouvron, effectue de nombreux coups de mains et
reconnaissances offensives : l’ennemi réagit par de violents bombardements à
obus toxiques et le secteur de calme qu’il était devient agité.
Le 17 août s’ouvre la série des combats heureux qui, en quelques jours, feront
progresser les lignes de plus de 12 kilomètres et les amèneront jusqu’à la ferme
de Montecouve.
A l’aube du 17, le 2e bataillon du 168e R.I. attaque : le but de cette opération
préliminaire est d’enlever la crête escarpée qui domine le ravin d’Autrêches. A
5 heures du matin, le bataillon s’élance à l’assaut des pentes qui dominent
Chevillecourt : après deux heures de combats, tous les objectifs sont atteints.
Les 5e et 6e compagnies ont leurs éléments de tête au sommet du plateau.
Au cours de l’attaque ont été faits prisonniers une centaine d’Allemands.
Le 169e R.I. avait à franchir le ravin d’Autrêches, coupure abrupte et profonde
que l’ennemi cherchait à rendre impraticable par la violence de son tir : mais
grâce au brillant et à l’ardeur des troupes assaillantes, l’attaque réussit
pleinement. Tous les objectifs furent atteints et le nombre de prisonniers et de
matériel resté entre nos mains fut considérable.
Le 18 août au matin, le 169e R.I. reprend l’attaque. Tout le plateau entre
Autrêches et Morsain est conquis. De nouveau, l’ennemi laisse entre nos mains de
nombreux prisonniers et un important matériel.
A 18 heures, le 168e R.I. fait un nouveau bond en avant.
Le3e bataillon, qui, dans la matinée, est venu se glisser à la droite du 2e
participe à l’action.
D’un seul élan, les objectifs une fois encore sont rapidement conquis. Toute la
croupe est à nous. Le 3e bataillon a atteint les lisières de Morsain : le 2e
bataillon est à la Salobrée sur les pentes Ouest du ravin e Vaux. Le 6e
bataillon du 1667e R.I., par une opération vigoureuse, nous donne toutes les
tranchées jusqu’à La Faloise et Morsain.
Le 19 août, le 110e R.I. qui est à pied d’œuvre dans la région de Bitry, vient à
son tour en ligne. L’ennemi qui s’est retiré au-delà d’Autrêches et de
Massenancourt recule sans cesse.
Dans la nuit du 19 au 20 août, le 2e et 3e bataillons du 110e descendent les
pentes qui conduisent à Vassens pour gagner leur base de départ qui est
sensiblement la route Vassens-Morsain : il fait dans cette opération 800
prisonniers, prend 5 canons, 6 mortiers de 240, 5 minewerfers légers, 160
mitrailleuses.
D’autres troupes passent encore sur notre terroir, telles que le 90e R.I., qui,
en réserve au 7e C.A., derrière les 55e et 48e D.I. qui attaquent, les suit au
Tiolet, puis, par le Bout de Vaux, va gagner la Salobrée où il bivouaque.
Le 20 août également, le 60e R.I. passe la nuit entre Autrêches et Vassens et
reprend sa marche le 21 vers Vassens, mais doit s’arrêter au nord de Vassens où
l’ennemi résiste.
Le 339e R.I., dans la nuit du 22 août, se porte en avant et s’installe au
bivouac dans la région de Chevillecourt où il séjourne jusqu’au 25 avant d’aller
se porter sur les croupes à l’ouest de la route de Coucy Le Château.
Le 23 août, notre pays est traversé par le 261e R.I. qui rejoint Vassens où il
attaque l’ennemi.
COMMUNIQUES OU SONT MENTIONNES LES COMBATS DU VILLAGE.
Les récits précédents suffisent amplement à montrer combien de fois Autrêches
fut le théâtre de luttes âpres, sauvages, sanglantes et à la fin victorieuses.
Ces dernières sont encore confirmées par la lecture des communiqués officiels,
publiés par le Grand Quartier Général, lesquels paraissaient, suivant les
périodes de la guerre, une ou deux fois par jour.
Cependant, et surtout au cours des trois premières années, cette relation
quotidienne n’avait pas la précision que nous aurions tous désiré lui voir. Ce
vague, cette obscurité voulus, étaient nécessaires pour ne pas :
1° Affoler l’opinion publique qui, plus encore à cette époque que maintenant,
était très impressionnable :
2° Renseigner l’ennemi sur nos opérations présentes et futures, sur notre
situation, sur nos pertes effectives ou territoriales.
Mais ceux qui savaient lire entre les lignes, ceux qui connaissaient quelque peu
l’orientation de notre front, ceux qui aussi avaient le bon sens d’interpréter à
la lettre le Communiqué et d’en déduire toutes les conclusions non mentionnées,
ceux-là, dis-je, savaient que les plateaux au nord de l’Aisne, le nord de Vic
sur Aisne, l’est de Quennevières, l’ouest de Nouvron et de Vingré étaient les
collines situées au-dessus de notre village et Autrêches même.
Le 14 septembre, après la victoire de la Marne, le communiqué dit :
« A notre aile gauche, nous avons franchi l’Aisne... L’ennemi a préparé au nord
de l’Aisne, entre Soissons et Compiègne, une ligne de défense qu’il a dû
abandonner. »
Le 15 septembre 1914 :
« Le front est jalonné par la région de Noyon, les plateaux au nord de Vic sur
Aisne et de Soissons ».
En s’exprimant ainsi, les G.Q.G. reconnaît que notre front s’est stabilisé et
que notre ligne passe environ par les plateaux de Quennevières, de Moulins Sous
Touvent, de Saint Victor, les hauteurs de la justice, par Autrêches et
Chevillecourt, le Bois Turier et les plateaux de Vingré et de Nouvron.
Puis, pendant quelques jours – 6 jours exactement – aux mouvements d’avance et
de recul que je relatais précédemment dans les combats pour Hautebraye,
Autrêches et Chevillecourt, le communiqué se tait, mais le 21 septembre 1914, il
annonce :
« Qu’à l’Est de l’Oise et au nord de l’Aisne les Allemands ont manifesté une
recrudescence d’activité. »
Puis, le 24 septembre 1914 :
« Entre l’Oise et l’Aisne, l’ennemi continue à maintenir des forces importantes
solidement retranchées. »
Cette précision laisse entrevoir, par la brièveté de son texte, combien la lutte
devait être rude et sanglante, et rien de ces mots ne laissait deviner que le 28
septembre 1914 :
« Entre l’Oise et l’Aisne, nos troupes ont légèrement progressé. »
Pour étoffer davantage les lignes squelettiques qui paraissaient journellement,
le lieutenant de Pierrefeu, puisque nous pouvons appeler de ce nom le rédacteur
de tous les communiqués, écrivait le 29 septembre 1914 :
« Entre Soissons et la forêt de l’Aigle, notre ligne prend les premiers plateaux
de la rive droite de l’Aisne. »
Puis, la situation restant toujours la même, le front se cristallisant chaque
jour davantage, les communiqués officiels se bornaient par la suite à
n’enregistrer que quelques actions d’artillerie ou quelques coups de mains,
quand sur l’ensemble des autres parties du font aucun événement saillant ne
valait la peine d’être cité.
C’est ainsi que le 14 octobre 1914, on enregistre :
« Nos troupes ont légèrement progressé dans la région Nord-Ouest de Soissons. »
Que le 2 novembre 1914 :
« Dans la région de l’Aisne, nous avons légèrement progressé sur certaines
parties de la rive droite de l’Aisne. »
Le 16 mars 1915 :
« Dans la vallée de l’Aisne près de Vassens, nord-ouest de Nouvron, nous avons
pris sous notre feu deux compagnies allemandes qui ont subi de fortes pertes. »
Le 7 juin 1915 :
« Au nord de l’Aisne, à l’est de Tracy-le-Mont, sur les hauteurs voisines de
Moulins-Sous-Touvent, nous avons prononcé une attaque qui a réalisé des gains
sérieux. »
C’est la célèbre attaque de Quennevières, par laquelle notre front étant déjà
percé, nos troupes arrivaient au-dessus de Nampcel, mais les renforts trop
éloignés et n’ayant pu parvenir à temps, devaient reculer sous les coups
Allemands qui, s’étant ressaisis, contre-attaquaient.
Si je cite ce communiqué du 7 juin 1915, c’est qu’Autrêches reçut le contre-coup
de cette victoire française momentanée : le secteur était redevenu agité et nos
pertes devenaient sensibles. Si les Allemands réagissaient dans notre village,
nous, Français, nous les avions fortement endommagés par notre démonstration
d’artillerie sur ce point pour permettre la surprise de Quennevières. Et les
bombardements d’artillerie continuent.
Le communiqué du 12 juillet nous dit :
« Sur les plateaux au nord de l’Aisne, le bombardement réciproques a été
particulièrement violent (région de Quennevières, Vic et Nouvron). »
Ceux des 23 juillet, 8 août et 19 août 1915 sont identiques comme teneur car :
« Dans la région de Quennevières et le plateau de Nouvron, on signale plusieurs
actions d’artillerie. »
Le 4 septembre 1915 :
« Dans la région de Quennevières et de Nouvron nous avons fait exploser
plusieurs mines qui ont sérieusement endommagé les organisations ennemies. »
Le 5 septembre 1915, à la suite de ces explosions, l’ennemi réagissant, on
constate :
« Des actions réciproques d’artillerie et d’engins de tranchées dans les
secteurs de Quennevières, de Vic et de Nouvron. »
A partir de ce moment, l’attention va se reporter sur d’autres fronts où des
combats, des tentatives de percée ont lieu, en Champagne et en Artois ; aussi le
communiqué ignore notre région, de même qu’en 1916 il n’en sera pas question,
car ce sera un secteur devenu très calme par suite du retrait d’une certaine
partie des troupes françaises et allemandes pour les deux rudes batailles de
Verdun et de la Somme.
En 1917, le 19 mars, et ceci nous donnait beaucoup d’espoir puisque notre
village était libéré de l’invasion teutonne, le communiqué après le repli des
Allemands vers la position Hindenburg, résultat tactique de notre avance dans la
Somme, disait :
« Entre l’Oise et Soissons, toute la première ligne allemande, ainsi que les
villages de Carlepont, Morsain, Nouvron, Vingré sont tombés en notre pouvoir. »
Autrêches était donc délivré et la vie allait reprendre difficile, certes, mais
tenace et pleine d’espoirs jusqu’au 2 juin 1918.
A cette date, la bataille faisait rage à nouveau sur les ruines renaissantes que
la vaillante phalange qu’est la population d’Autrêches avait reconquises sur le
néant.
Le communiqué qui n’annonçait jamais de défaite disait seulement :
« Entre l’Oise et l’Aisne, nous avons reporté nos positions aux lisières Nord du
bois de Carlepont et sur les hauteurs à l’Ouest d’Audignicourt jusqu’à Fontenoy
. »
N’était-ce pas dire qu’Autrêches était retombé aux mains des Allemands ?
Cependant, nous devons nous rendre à l’évidence en reconnaissant que les
communiqués de cette période n’étaient plus aussi laconiques que ceux des années
1914 et 1915.
Cette réoccupation ennemie n’allait pas sans alternatives d’avance et de recul
de part et d’autre des belligérants, car on nous annonçait, le 4 juin 1918, que
:
Toutes les tentatives de l’ennemi entre Oise et Aisne notamment au nord de
Moulins-Sous-Touvent et de Vingré sont restées vaines. »
Le 13 juin 1918 :
« Dans la région d’Hautebraye, nous avons repoussé une attaque ennemie et fait
des prisonniers. »
Puis c’est bientôt la préparation de la victoire, et deux mois plus tard, nous
allions voir Autrêches libéré à jamais des Allemands.
En attendant cette époque, on enregistre le 17 juin 1918 :
« Entre l’Oise et l’Aisne, nous avons réussi ce matin une opération de détail
qui nous a permis d’élargir nos positions au Nord et au Nord-Ouest d’Hautebraye
: nous avons fait une centaine de prisonniers et capturé des mitrailleuses. »
Le 18 juin 1918 :
« Nous avons repoussé des contre-attaques ennemies au nord d’Hautebraye et
consolidé nos gains de ce main. Le chiffre de prisonniers atteint 370 ; nous
avons pris 25 mitrailleuses et 8 mortiers. »
A dater de ce jour, Autrêches ne réapparaîtra plus que trois fois dans le
communiqué : pour nous annoncer, le 18 août 1918 :
« Qu’au nord de l’Aisne, une opération locale exécutée ce matin nous a permis,
dans la région d’Autrêches, d’enlever les positions ennemies sur un front de 5
kilomètres et une profondeur de 1.500 mètres environ : 240 prisonniers sont
entre nos mains. »
Le 19 août, M. de Pierrefeu annonce ce qui suit :
« Hier, vers 18 heures, ente l’Oise et l’Aisne, nos troupes ont rectifié leur
front sur une étendue de 15 kilomètres environ, entre le sud de Carlepont et
Fontenoy, réagissant ainsi sur toute la ligne une progression moyenne de 2
kilomètres. Nous avons occupé le plateau à l’Ouest de Nampcel, atteint le rebord
sud du ravin d’Audignicourt et conquis Nouvron, Vingré. Nous avons fait 1.700
prisonniers. »
LA DÉLIVRANCE
Cette fois, c’est donc la délivrance de nos ruines et l’espoir de voir bientôt
nos ennemis « boutés hors France ». Cette délivrance est vraiment effectuée
puisque, le 20 août 1918, le communiqué dit :
« Au nord de l’Aisne, complétant notre succès entre Carlepont et Fontenoy, nous
avons enlevé le village de Morsain. »
C’est fini : le communiqué officiel ne relate plus le nom d’Autrêches. Des
victoires chaque jour s’y inscriront comme chaque jour grandira l’héroïsme de
nos soldats. Mais nous ne devrons jamais oublier que notre village meurtri,
blessé, torturé, ruiné à deux reprises différentes, aura été l’un des points de
départ de la victoire finale qui a couronné la guerre que la France a faite pour
le Droit, la Justice, la Liberté et la Civilisation.