Règles de la Manille

D’origine espagnole, la manille (Malilla) est un jeu de cartes assez ancien qui s’est répandu surtout dans le Midi de la France. La manille est issue de l’Hombre et est citée dans l’édition de 1718 des Académies Universelles des jeux. Ce jeu a commencé avec la manille parlée, qui était alors la seule connue dans le Midi, puis, on a créé la manille aux enchères, la manille muette et plusieurs autres variantes. La manille comprend un très grand nombre de variantes qui diffèrent d’une région à l’autre.

Retrouvez dans cette section différentes variantes de manille, la manille parlée, muette, la manille découverte ou manille à deux, à trois, la manille aux enchères à trois, quatre ou cinq, la coinchée ou manille contrée.

Différentes variantes de manille :

1 - La manille parlée
2 - La manille muette
3 - La manille découverte ou manille à deux
4 - La manille à trois
5 - La manille aux enchères
6 - La manille aux enchères à quatre, à cinq
7 - La manille à l'envers
8 - La manille avec misères
9 - Le dix-sept
10 - La coinchée ou manille contrée

La manille parlée

C'est la manille proprement dite, qui se joue avec un jeu de trente-deux cartes.

Ordre de valeur des cartes et points qu'elles représentent :

Certaines cartes, comme les honneurs au whist, ont une valeur qui leur est propre : la manille, ou dix de chaque couleur, est la carte maîtresse, elle vaut cinq points. Le manillon ou as vaut quatre points. Le roi, qui vient ensuite, est compté trois points. Puis viennent la dame, deux points et le valet, un point, soit au total dans chaque couleur quinze points, ou pour les quatre couleurs soixante points.

• La manille (dix) vaut 5 points.
• Le manillon (as) vaut 4 points.
• Le roi vaut 3 points.
• La dame vaut 2 points.
• Le valet vaut 1 point.

Une levée de quatre cartes vaut 1 point.

Chaque joueur dispose ses cartes par couleur et valeur : manille d'abord, puis manillon, etc...

L'atout l'emporte sur toutes les cartes, quelles que soient leurs couleurs et leur valeurs.

La partie a lieu généralement en 34 points ou en deux manches de 34 et la belle en 54.

Nombre de joueurs

Quatre personnes, partagées en deux camps, les joueurs du même camp étant en diagonale.

Désignation du donneur et genre de donne

On étale sur la table, le jeu face en dessous, chacun choisit une carte. Celui qui a la plus basse distribue.
Chaque joueur, en commençant par celui à droite du donneur, reçoit huit cartes données par deux ou par quatre. La dernière du donneur est retournée par celui-ci : c'est l'atout. Cette carte demeure visible, face en dessus, tant que la première carte n'a pas été jouée.

Manière de jouer

Les associés se renseignent sur leurs jeux respectifs. Le premier à jouer demande à son associé : « Avez-vous des manilles? » Celui-ci répond affirmativement ou négativement. — Et de l'atout?

Il répond de même... oui ou non, beaucoup ou peu... Les joueurs ne doivent parler que lorsque c'est au tour de l'un d'eux à jouer. La parole n'appartient qu'à un camp à la fois. Toute question et réponse sera claire et ne laissera nul doute.

Le jeu est mis à nu. Le premier à jouer observe le sien tout en connaissant celui de son adversaire et il cherche à faire un grand nombre de levées en jouant ses meilleures manilles ou en faisant couper ses adversaires sur de faibles cartes.

Le jeu du partenaire étant connu, le premier à jouer met une carte sur la table. Le partenaire du donneur renseigne alors son associé sur la composition de son jeu.

Quand on le peut, il faut fournir la couleur demandée et monter sur les cartes de son adversaire. Si on ne peut fournir, on coupe, à moins que le partenaire ne soit maître.

Quand la couleur demandée a été coupée par le camp opposé, il faut surcouper. Si ce n'est pas possible, on n'est pas tenu de mettre de l'atout.

Celui qui mène le jeu peut montrer ses cartes à son associé; mais il le montrera aussi à ses adversaires.

Il est interdit de regarder les levées déjà faites.

Comment la partie est gagnée ou perdue

La partie terminée, chaque camp fait de la manière suivante le compte des cartes qu'il a relevé :

Manille, 5; manillon, 4; roi, 3; dame, 2; valet, 1.

Les autres cartes sans valeur. On compte un point par levée faite.

Le camp qui a le plus petit nombre de points ne marque rien.

Le camp adverse en marque autant qu'il en a compté au-dessus de 34.

La somme des points comptés par les deux camps doit égaler 68.

La manille muette

Les partenaires ne doivent pas s'interroger. Nul ne peut donc connaître le jeu de son voisin, d'autant plus qu'aucun geste qui puisse renseigner ne doit être fait.

La règle est la même que pour la manille parlée.

Cette manille est, pour beaucoup de joueurs, plus intéressante que la précédente, demandant beaucoup plus de finesse et de mémoire de jeu, puisqu'on ne peut ni se dire un mot, ni faire un signe pour renseigner son partenaire. C'est, en réalité, un bridge à 32 cartes, beaucoup moins difficile, mais excellent pour donner aux joueurs le tour de main du bridge. Le jeu est absolument identique à la manille parlée, sauf cette restriction. Il y a également une tourne, dont on marque également la valeur. La partie peut se jouer liée en 44 points avec belle en 54 points s'il y a lieu.

La manille découverte ou manille à deux

Les amateurs de manille, lorsque qu’ils manquent de partenaires, jouent même à deux joueurs.

Donne

Le donneur distribue les cartes par groupe de quatre, placés séparément sur une même ligne. A la fin de la distribution, les deux joueurs se trouvent avoir, devant eux, une rangée de quatre paquets de quatre cartes.

Atout

C'est la trente-deuxième ou dernière carte du, dernier paquet et qui, retournée par le donneur, est mise, face visible, sur la table.

Manière de jouer

Les deux joueurs retournent la première carte des quatre paquets qui sont devant eux, sauf le donneur qui, ayant déjà retourné une carte, l'atout n'en retourne alors que trois.

La partie a lieu, quatre cartes contre quatre cartes, comme dans la manille ordinaire et chacun voit, en partie, le jeu de son adversaire.

Chaque carte ayant été jetée sur le tapis, on la remplace en retournant la suivante. Autrement dit après chaque levée, on retourne la carte supérieure du paquet sur lequel on a pris la carte jouée et, ainsi, jusqu'à épuisement des seize cartes.

Total des points

La partie terminée, on compte les points en tenant compte de la valeur de chaque carte, comme nous l'avons indiqué précédemment. Chaque levée équivaut à 1 point. Le total est 76.

Le joueur qui obtient plus de 38, marque l'excédent.

La partie se fait le plus souvent en 38 points.

La manille à trois

Chacun pour soi. Telle est la règle de cette manille qui est muette.

Donne

Chaque joueur reçoit dix cartes, distribuées trois par trois et une pour terminer.

Talon

Il est composé de deux cartes et nul ne peut en prendre connaissance.

Atout

C'est la dixième carte du donneur retournée.

Les autres règles sont celles de la manille ordinaire, la partie se joue en 34 ou 44 points.

Total des points

La partie finie, on compte comme dans la manille découverte, chaque joueur marque autant de points qu'il en a obtenu au-dessus de 17.

Le joueur qui a fait toutes les levées réalise donc un total de 53, puisque celui qu'on peut compter est 70.

La manille aux enchères

La plus intéressante, surtout à trois.

A la manille aux enchères, chacun joue pour son propre compte. Comme marche de jeu, valeur et ordre de cartes, ce sont les conventions de la manille ordinaire. La manille aux enchères se joue à trois, quatre, cinq, six et même sept joueurs. Chaque joueur demande à son tour à faire un nombre de points qu'il désigne, et dont le total doit être supérieur à celui demandé par le dernier joueur ayant parlé. L'enchère se continue ainsi jusqu'à ce que tous les joueurs, moins un, aient renoncé à enchérir.

Trois manières de jouer à la manille aux enchères à trois :

1 - Sans surprise

Toutes les cartes, moins deux (le sept de pique et le sept de trèfle), préalablement enlevées du jeu, sont distribuées, à raison de 10 à chacun.

2 - A la petite surprise

Chacun reçoit 10 cartes, on en laisse deux faces en dessous sur le tapis.

3 - A la grande surprise

Neuf cartes chacun, cinq sont abandonnées sur la table, trois dos en dessus, deux faces visibles.

L'enchère

Le premier à jouer annonce combien il a l'intention de faire de points. Si, c'est, par exemple 35, le joueur suivant annonce 36 et le troisième 37. Celui qui ne veut pas monter dit : « Je passe ». Il ne reviendra plus sur sa parole.

Naturellement, c'est les cartes en main que cette demande a lieu. Le premier joueur établit son nombre de points d'après la composition de son jeu, rangé par couleurs et valeurs. Si les joueurs suivants ont un beau jeu et peuvent faire plus d'un point sur celui du premier joueur, ils accroissent d'une ou plusieurs unités.

On dit : « Je passe » quand on a un vilain jeu.

Quand un joueur a obligé les autres à passer, il est le premier à jouer. S'il y a des cartes de surprise, il les ramasse et il retire, de son jeu, le nombre de cartes qu'il désire, pour le remplacer par un nombre égal de cartes de surprise. Il ne les montre à personne, indique l'atout et joue.

Là, il est seul contre les autres, qui sont contre lui. Il doit toujours monter, couper, ou surcouper. Les autres doivent également couper sur lui, mais peuvent se « défausser » dès qu'un des associés est maître.

On doit toujours fournir de la carte appelée quand on en a.

Exemple : L'acquéreur joue trèfle; le second n'en a pas. Il est obligé de couper et si le troisième a du trèfle, il est forcé d'en mettre. Si, au contraire, le troisième n'a pas de trèfle, il n'est nullement obligé de couper.

But de la manille aux enchères

Les joueurs doivent se liguer contre celui dit demandeur, de manière à l'empêcher d'atteindre le chiffre qu'il a fait connaître.

L'atout l'emporte sur tout. Donc, un sept d'atout coupe une manille.

La manille l'emporte sur un manillon, le manillon sur un roi. Le roi sur la dame, qui emporte le valet, etc.

On doit fournir à la carte posée. Le demandeur peut montrer sa carte. S'il n'a pas d'atout, il en jette une fausse. Les autres joueurs, si l'un est maître sur le demandeur, ne sont pas contraints à monter ni à couper. Ils peuvent conserver leurs atouts pour des coupes ultérieures.

Total des points

Le demandeur ou acquéreur fait son calcul selon la méthode ordinaire. S'il a réalisé autant de points qu'il l'a annoncé, il les marque. S'il en a fait moins, même un seul, les autres joueurs marquent les points demandés.

Le premier qui atteint 150 a gagné.

La manille aux enchères à quatre, à cinq

Toutes ces manilles se jouent comme celle aux enchères à trois.

A quatre, il n'existe pas de talon. Chaque joueur reçoit huit cartes et le maximum de points est 68.

A cinq. Chaque joueur reçoit six cartes, maximum de points : 66. Les deux cartes du talon ne sont pas utilisées.

La manille à l'envers

La manille à l’envers est la plus amusante de toutes. On lui donne également les noms de « Charentonnaise » et de « manille folle ».

Elle se joue à quatre joueurs, mais, on peut la jouer à trois ou à cinq joueurs. A trois joueurs, elle est moins divertissante.

Le donneur distribue tout le jeu de cartes, et ne fait pas de retourne.

Le premier à jouer, après examen de son jeu, indique l'atout.

Il s'agit de ne pas faire de levées, si possible, et, en tout cas, le moins de points possible.

La partie se joue généralement en partie de 100 points.

Le premier joueur qui arrive à 100 points perd la partie.

Celui qui choisit l'atout l'indique dans sa couleur la plus faible, et joue généralement de suite atout, pour s'en débarrasser, et pouvoir se défaire de ses grosses cartes sur les autres coups d'atout, ou joue un manillon, pour le faire prendre par la manille de sa couleur, chez un adversaire.

On doit forcer sur la couleur demandée, et il est interdit de faire de renonce. A cette manille, comme aux autres, quand on a un jeu chargé de manilles et de cartes maîtresses, on peut demander « le général ». Si on fait toutes les levées, les adversaires marquent 68 points.

Mais le général est plus facile à faire qu'aux autres manilles. Comme il n'y a qu'un perdant, celui qui arrive à 100 le premier, ou dépasse 100 du plus grand nombre de points, tous ceux qui ont moins de points ont intérêt à favoriser le demandeur.

Supposons Pierre ayant à la marque 40 points, Paul 10 points, et Jacques 18 points, Jean n'a rien de marqué et demande « le général ». Il est évident qu'à coup sûr Paul et Jacques peuvent jeter sur le jeu de Jean toutes leurs cartes maîtresses, car si Jean réussit, Pierre seul perd, et d'un autre côté, ils doivent penser que Jean n'a pas fait sa demande sans de grandes probabilités de réussir. En ne le favorisant pas, et en admettant qu'il ne réussisse pas, Jean marquerait 68 points, et tout le monde serait encore au jeu. A ce jeu, il faut s'attacher surtout à ne pas garder en main de cartes maîtresses, quand on peut s'en défausser.

La manille avec misères

La manille avec misère est exactement la manille aux enchères, mais avec complication.

Le joueur qui prétend ne pas faire une seule levée avec le jeu qui lui a été distribué peut, à son tour de parler, demander la petite misère ou misère simple. Cette demande se place entre l'enchère de 32 points et celle de 33. On joue sans montrer son jeu, qui est inconnu des adversaires. Si quelqu'un demande 33, la petite misère n'existe plus.

Quand on demande la misère sur table, l'adjudication se place entre 42 et 43 points. Si un adversaire demande 43, les enchères continuent. Dans ce deuxième cas, le joueur abat son jeu sur le tapis à la Vue de tous. Les joueurs doivent garder, pendant le coup, un silence complet, sans signes ni observations.

Entre l'enchère de 52 et 53 points se place la grande misère. Comme dans la précédente, le demandeur abat son jeu sur la table, mais les adversaires se consultent sur les cartes à jouer, sans indiquer cependant ce qu'ils ont dans leur propre jeu.

Enfin vient la misère suprême, qui a le pas même sur le général. Chacun étale son jeu sur la table, et les adversaires du demandeur se consultent sur leurs jeux réciproques. Lorsqu'on joue avec de bons joueurs, il ne faut demander la suprême qu'à coup sûr, car si le jeu du demandeur a le moindre défaut, on lui fera faire une levée, même avec un huit.

Le dix-sept

Le dix-sept est une manille dans laquelle chacun joue pour son compte, et marque le total des points des levées qu'il a faites. Comme elle se joue généralement à quatre joueurs, et qu'il y a, au jeu, 68 points, dont 17 est le quart, pour avoir son compte, il faut faire 17 points.

On joue également cette manille à trois joueurs en enlevant deux sept. Le donneur retourne la dernière carte qui est l'atout et lui appartient. On ne compte pas les points de la retourne.

La partie se joue de deux manières :

1. Au coup.
On convient du prix de l'unité de point. Ceux qui ont moins de 17 points mettent, au tapis, autant d'unités qu'il leur manque de points. Sur cette masse, ceux qui ont plus de 17 points se partagent ces mises, au prorata de leur excédent de points. Ceux qui ont 17 points ne touchent ni ne versent rien.

2. A la partie.
On fixe un total de points à atteindre. Le marqueur inscrit le compte obtenu par chacun à chaque coup. Quand un joueur arrive au total, il est hors de coups, mais continue à jouer, jusqu'à ce que tous les joueurs moins un aient également terminé.

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