Loi 69-00

Dahir n° 1-02-25 du 19 Moharrem 1423 (3 avril 2002) portant promulgation de la loi n° 61-99 relative à la responsabilité des ordonnateurs, des contrôleurs et des comptables publics.

BO n°5000 du 18 Safar 1423 -02 Mai 2002

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LOUANGE A DIEU SEUL !

(Grand sceau de sa majesté Mohammed VI)

Que l’on sache par les présents – puisse dieu en élever et en fortifier la teneur !

Que notre Majesté chérifienne,

Vu la constitution, notamment ses articles 26 et 58,

A DECIDE CE QUI SUIT :

Est promulguée et sera publiée au bulletin officiel, à la suite du présent dahir, la loi n° 61-99 relative à la responsabilité des ordonnateurs, des contrôleurs et des comptables publics, adoptée par la chambre des représentants et la chambre des conseillers.

Fait à Agadir, le 19 moharrem 1423 (3 avril 2002)

Pour contreseing :

Le premier ministre,

ABDERRAHMAN YOUSSEFI

*

* *

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loi n° 61-99

relative à la responsabilité des ordonnateurs,

des contrôleurs et des comptables publics

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CHAPITRE PREMIER

De la responsabilité des ordonnateurs,

des contrôleurs et des comptables publics

I. Dispositions générales

Article premier

La présente loi a pour objet de fixer la responsabilité des ordonnateurs, des contrôleurs et des comptables publics de l’Etat, des collectivités locales et leurs groupements ainsi que ceux des établissements et entreprises publics soumis au contrôle financier de l’Etat pour les actes qu’ils prennent, qu’ils visent ou qu’ils exécutent dans l’exercice de leurs fonctions respectives.

Sauf cas de force majeur ou de dérogations prévues par la loi, lesdits ordonnateurs, contrôleurs et comptables publics encourent une responsabilité qui peut être disciplinaire, civil ou pénale, sans préjudice des sanctions qui peuvent être prises à leur encontre par la cour des comptes ou les cours régionales des comptes.

Article 2

Au sens de la présente loi, en entend par :

-« Ordonnateur » de l’un des organismes visés à l’article premier ci-dessus : l’ordonnateur de droit, l’ordonnateur désigné, l’ordonnateur délégué, le sous-ordonnateur et leurs suppléant ;

-« contrôleurs, » tout fonctionnaire ou agent chargé, en vertu de la législation et de la réglementation en vigueur :

-soit du contrôle des engagements des dépenses de l’Etat, d’une collectivité locale ou d’un groupement ;

-soit du contrôle financier de l’Etat exercé sur les établissements et entreprises publics.

-« Comptable public », tout fonctionnaire ou agent ayant qualité pour exécuter au nom de l’un des organismes précités des opérations de

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recettes, de dépenses ou de maniement de titres, soit au moyen de fonds et valeurs dont il a la garde, soit par virements internes d’écritures, comptes externes de disponibilités dont il ordonne ou surveille les mouvements.

Article 3

Chaque ordonnateur, contrôleur ou comptable public est responsable des actes qu’il a pris, visés ou exécutés depuis la date de sa prise de service jusqu’à celle de cessation de ses fonctions.

Article 4

Les ordonnateurs sont, en vertu des lois et règlements en vigueur, personnellement responsables :

-du respect des règles d’engagement, de liquidation et d’ordonnancement des dépenses publiques ;

-du respect de la réglementation relative aux marchés publics ;

-du respect de la législation et de la réglementation relatives à la gestion du personnel ;

-des ordres de réquisition dont ils ont fait usage en matière de paiement des dépenses publiques ;

-du respect des règles relatives à la constatation, a la liquidation et à l’ordonnancement des créances publiques ;

-du recouvrement des créances publiques dont ils ont éventuellement la charge en vertu de la législation en vigueur ;

-du respect des règles de gestion du patrimoine de l’organisme public en leur qualité d’ordonnateurs de recettes et de dépenses.

Toutefois, les dispositions du présent article ne s’appliquent pas en matière de discipline budgétaire et financière aux membres du gouvernement et aux membres de la chambre des représentants et de la chambre des conseillers lorsqu’ils exercent leurs fonctions en cette qualité.

Article 5

Les contrôleurs des engagements de dépenses sont personnellement responsables des contrôles qu’ils sont tenus d’exercer sur les actes d’engagements de dépenses conformément aux lois et règlements en vigueur, en vue de s’assurer :

- de la disponibilité des crédits ;

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- de la disponibilité du poste budgétaire, du respect des règles statutaires régissant les recrutements, les nominations et les promotions de grades ;

- de la conformité du projet de marché à la réglementation relative à la passation des marchés publics et notamment la production du certificat administratifs ou le rapport de présentation du marché justifiant le choix du mode de passation du marché ;

- que le montant de l’engagement proposé porte sur la totalité de la dépense à laquelle l’administration s’oblige.

Les contrôleurs financiers des établissements et entreprises publics soumis au contrôle financier de l’Etat sont personnellement responsables des contrôles expressément prévus par la réglementation en vigueur ou par les instructions particulières du ministre des finances qu’ils exercent sur les actes qu’ils ont visés, en vue de s’assurer de :

-la conformité du marché de travaux, de fournitures ou de services aux règles d’appel à la concurrence applicables à l’organisme concerné ;

-la régularité des actes relatifs aux acquisitions immobilières, aux conventions passées avec les tiers et aux octrois de subventions ;

-la qualité des personnes habilitées en vertu de la réglementation en vigueur à l’effet de signer les propositions d’engagement de dépenses.

Le contrôleur financier est également responsable de la vérification de la régularité des actes relatifs aux recettes lorsque lesdits actes sont, en vertu de la réglementation en vigueur, soumis à son visa.

Article 6

Les comptables publics de l’Etat, des collectivités locales et de leurs groupements sont, sauf réquisition régulièrement prise par l’ordonnateur, personnellement et pécuniairement responsables, dans la limite des compétences qui leur sont dévolues par les lois et règlements en vigueur :

- de la conservation des fonds et valeurs dont ils ont la garde ;

- de la position des comptes externes de disponibilités qu’ils surveillent ou dont ils ordonnent les mouvements ;

- de l’encaissement régulier des recettes dont le recouvrement leur est confié ;

- du contrôle de la validité de la dépense portant sur l’exactitude des calculs de liquidation, l’existence de la certification ou du visa préalable d’engagement lorsque cette certification ou ce visa est requis et le caractère libératoire de règlement ;

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- des paiements qu’ils effectuent.

Ils sont en outre tenus de s’assurer :

* de la qualité de l’ordonnateur ;

* de la disponibilité des crédits ;

* de la production des pièces justificatives qu’ils sont tenus d’exiger avant le paiement des dépenses en application de la réglementation en vigueur.

(Dahir n° 1-04-255 du 29/12/2004)

Les agents comptables des établissements et entreprises publics soumis au contrôle financier de l’Etat sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles, expressément prévus par les lois et règlements en vigueur ou par les instructions particulières du ministre des finances, qu’ils exercent sur les actes qu’ils sont visés, en vue de s’assurer :

- de la présentation de pièces justificatives régulières établissant la réalité des droits du créancier et du service fait

;

- du paiement au véritable créancier ;

- du visa préalable du contrôleur financier lorsque ce visa est requis ;

- du recouvrement des recettes lorsque ledit recouvrement leur est confié en vertu de la réglementation en vigueur.

Ils sont en outre tenus de s’assurer, le cas échéant, de la production d’une réquisition régulière établie par la direction de l’organisme concerné.

Article 6 bis

La responsabilité de l’ordonnateur peut être engagée au cas où le budget de l’un des organismes visés à l’article 1er ci-dessus, dont il assure l’exécution, aura supporté le paiement d’intérêts moratoires pour retard de paiement des sommes dues au titre d’un marché public tels que prévus par la réglementation en vigueur, suite à un retard d’ordonnancement dont il se serait rendu personnellement responsable.

La responsabilité du comptable peut également être engagée au cas où le budget de l’un des organismes visés à l’article premier ci-dessus, dont il assure l’exécution, aura supporté le paiement desdits intérêts moratoires, suite à un retard de paiement dont il se serait rendu personnellement responsable

(Loi de Finances 2004- BO n° 5174 du 1er /01/04)

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Article 7

Tout fonctionnaire ou agent placé sous les ordres d’un ordonnateur, d’un contrôleur ou d’un comptable public ou agissant pour le compte de l’un d’entre eux, peut être rendu personnellement responsable aux lieu et place de l’ordonnateur, du contrôleur ou du comptable public, lorsqu’il est établi que la faute commise est imputable audit fonctionnaire ou agent.

II.- Dispositions particulières aux comptables publics

Article 8

Sans préjudice des attributions de la cour des comptes et des cours régionales des comptes en matière de vérification et de jugement des comptes présentés par les comptables publics, le ministre des finances peut, au vu des constatations faites lors des contrôles qui lui sont dévolus par les lois et règlements en vigueur, déclarer débiteur le comptable publics pour le montant du déficit de caisse, du manquant en valeurs, d’omission dans le recouvrement d’une créance publique ou du paiement irrégulier d’une dépense publique, dont ledit comptable serait reconnu responsable.

Une ampliation de ladite décision est notifiée, dans les 30 jours à la cour des comptes compétente.

Le ministre des finances peut, toutefois, sur demande dudit comptable, accorder à celui-ci un sursis de versement des sommes mises à sa charge en cas de demande en décharge de responsabilité ou de demande de remise gracieuse.

Article 9

Les comptables publics sont tenus, dès leur prise de fonctions, de souscrire à titre individuel ou collectif, une police d’assurance auprès d’une entreprise d’assurance agréée, garantissant durant l’exercice de leurs fonctions, leur responsabilité personnelle et pécuniaire visée à l’article 6 ci-dessus.

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Aux termes de ce contrat sont assurés les risques pouvant résulter de perte, de destruction, de vol de fonds ou valeurs dont ils ont la garde, d’arrêts ou de décisions les déclarants débiteurs.

Les primes annuelles d’assurances sont à la charge des comptables publics, auxquels une attestation est délivrée aux fins de production à la juridiction financière compétente.

Sont fixées par voie réglementaire, les modalités d’application de et article et notamment les seuils minima devant être garantis par nature de risque et par catégorie de comptables publics.

CHAPITRE II

De la décharge de responsabilité

Article 10

L’ordonnateur condamné au remboursement ou le comptable public mis en débet ou déclaré débiteur, ainsi que le fonctionnaire ou l’agent visés à l’article 7 ci-dessus peuvent à leur demande, être déchargés de leur responsabilité en cas de force majeure, à la condition toutefois que l’acte ayant été à l’origine de la décision de remboursement ou du débet ou ayant déclaré l’un d’entre eux débiteur ne leur ait pas procuré un avantage personnel.

Cette demande peut, le cas échéant, être présentée par leurs ayants droit.

Article 11

La demande en décharge de responsabilité visée à l’article 10 ci-dessus, présentée par l’ordonnateur, le fonctionnaire ou l’agent visés à l’article 7 ci-dessus placés sous les ordres d’un ordonnateur ou agissant pour son compte, est instruite par le ministre concerné ou l’autorité de tutelle de l’organisme public intéressé et transmise au premier ministre.

Pour les collectivités locales, leurs groupements et les établissements et entreprises publics soumis au contrôle financier de l’Etat, la

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demande en décharge de responsabilité doit avoir recueilli au préalable l’avis favorable de l’organe délibérant.

La décharge de responsabilité accordée par le premier ministre libère totalement ou partiellement le demandeur concerné au regard du remboursement mis à sa charge et lui permet d’obtenir, s’il y a lieu, la restitution des sommes déjà versées en atténuation dudit montant.

Une ampliation de ladite décision est notifiée dans les 30 jours à la cour des comptes compétente.

Article 12

La demande en décharge de responsabilité, présentée par le comptable public, le fonctionnaire ou l’agent visées à l’article 7 ci-dessus placés sous les ordres d’un comptable public ou agissant pour un compte, est instruite par le supérieur hiérarchique et transmise au ministre des finances.

La décharge de responsabilité accordée par le ministre des finances, libère totalement ou partiellement le demandeur concerné du montant mis à sa charge et lui permet d’obtenir, s’il y a lieu, la restitution des sommes déjà versées en atténuation dudit montant.

Une ampliation de ladite décision est notifiée dans les 30 jours à la cour des comptes compétente.

Article 13

Le rejet, selon le cas, par le premier ministre ou le ministre des finances, de la demande en décharge de responsabilité ne fait pas obstacle à la demande de remise gracieuse.

CHAPITRE III

De la remise gracieuse

Article 14

L’ordonnateur condamné au remboursement ou le comptable public mis en débet ou déclaré débiteur, ainsi que le fonctionnaire ou l’agent visés à l’article 7 ci-dessus peuvent demander la remise gracieuse des sommes mises ou demeurées à leur charge dans les conditions fixées par le règlement général de comptabilité publique, sous réserve des dispositions prévues à l’article 15 ci-après.

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Cette demande peut, le cas échéant, être présentée par leurs ayants droit.

Article 15

Pour bénéficier de la remise gracieuse, le demandeur doit justifier sa requête par des circonstances tenant à sa situation financière, à la condition toutefois que l’acte ayant été à l’origine de la décision de remboursement, du débet ou l’ayant déclaré débiteur ne lui ait pas procuré un avantage personnel et qu’il n’ait pas organisé son insolvabilité au sens de l’article 84 de la loi n° 15-97 formant code de recouvrement des créances publiques.

Pour les collectivités locales, leurs groupements et les établissements et entreprises publics soumis au contrôle financier de l’Etat, la demande de remise gracieuse doit avoir recueilli au préalable l’avis favorable de l’organe délibérant.

CHAPITRE IV

Dispositions communes

Article 16

Les sommes allouées en décharge de responsabilité ou en remise gracieuse sont supportées par le budget de l’organisme concerné.

Article 17

Lorsque les sommes mises à la charge des personnes visées aux articles 1 et 7 ci-dessus s’avèrent irrécouvrable, leur admission en nom valeur est prononcée conformément aux lois et règlements en vigueur et donne lieu à réduction de prise en charge.

Toutefois, dans le cas où l’admission en nom valeur concerne une décision déclarant débiteur un comptable public en application de l’article 8 ci-dessus, le montant correspondant donne lieu à ordonnancement sur le budget de l’organisme concerné.

Toute somme recouvrée ultérieurement est portée en recette au budget de l’organisme concerné.

CHAPITRE V

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Dispositions finales

Article 18

Les dispositions de la présente loi sont applicables aux ordonnateurs et aux comptables relevant de la défense nationale et du service de l’intendance militaire sous réserve des dispositions particulières édictées par :

le dahir n° 1-58-349 du 6 kaada 1378 (14 mai 1959) portant création du service de l’intendance militaire ;

le dahir n° 1-59-193 du 15 safar 1379 (20 août 1959) portant règlement sur la comptabilité financière du ministère de la défense nationale.

Article 19

La présente loi qui entrera en vigueur à compter de la date de sa publication au bulletin officiel, abroge le dahir du 2 chaabane 1374 (2 avril 1955) sur la responsabilité des comptables publics et le décret royal n° 799-65 du 26 kaada 1385 (18 mars 1966) portant création d’une agence comptable centrale des chancelleries diplomatiques et consulaires.

Les dispositions de l’article 9 entrent en vigueur à compter de la date de publication du texte réglementaire visé au 4e alinéa dudit article ; sont abrogées celles du dahir du 26 ramadan 1343 (20 avril 1925) sur le cautionnement des comptables de deniers publics.

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