 L’appareil.

La marmite de Papin, représentée par le dessin ci-contre, et dont un exemplaire figure dans la collection des instruments scientifiques anciens du lycée Bertran de Born, consiste en un vase cylindrique de bronze, très résistant, dont le couvercle est fortement maintenu par une vis de pression. Un levier chargé d’un poids, ferme une soupape de sûreté.

 Son utilisation.

Si l’on met de l’eau dans le vase que l’on chauffe, la pression de la vapeur d’eau qui se forme et s’accumule dans le récipient augmente considérablement de même que la température intérieure. La température de l’eau notamment, peut devenir bien supérieure à celle (100°C) de l’ébullition « ordinaire » : 120°C, par exemple, lorsque la pression est égale à deux fois la pression atmosphérique, ou encore 160°C sous six atmosphères. Lorsque la pression intérieure atteint une valeur suffisante pour que le levier soit soulevé, la soupape de sûreté joue son rôle en laissant s’échapper de la vapeur. Si l’on continue de chauffer modérément, la masse d’eau qui se vaporise pendant un certain temps est égale à celle de la vapeur qui s’échappe pendant le même temps. Un équilibre dynamique s’établit et la température et la pression intérieures restent constantes.

 Un peu d’histoire.

L’importance de la température de l’eau explique son grand pouvoir dissolvant : les os s’y ramollissent, la gélatine qu’ils contiennent est dissoute et l’on prépare ainsi du « bouillon de gélatine ». On a pu extraire de la gélatine d’os fossiles et l’on raconte même que vers le début du 19ème siècle, on a servi sur la table du préfet du Nord, de la gélatine extraite d’os de grands mammifères fossiles, c’est-à-dire d’animaux morts depuis plus de 6000 ans. On comprend pourquoi cet appareil est aussi dénommé digesteur de Papin. Cet instrument que le physicien français Denis Papin (1647-1714) mit au point avec son confrère britannique Robert Boyle, a été décrit pour la première fois en Angleterre en 1681, sous le nom de Nouveau digesteur, dans un ouvrage qui fut traduit en français sous le titre : Manière d’amollir les os, etc. Papin le destinait particulièrement à la cuisson rapide des légumes et de la viande. Par la suite, il a été fait usage pendant quelque temps, dans les ménages, d’appareils analogues, que leur mode de fermeture a fait nommer marmites autoclaves. Malgré l’adjonction de la soupape de sûreté, ces ustensiles, entre des mains inexpérimentées, ont occasionné des accidents qui les ont fait abandonner.

 Le retour.

Il aura fallu attendre 1953 pour que la Société d’Emboutissage de Bourgogne (SEB) lance sa Super-Cocotte en aluminium embouti. Grâce à des ingénieurs astucieux, cette reprise du digesteur assorti d’innovations techniques connut très vite un grand succès, malgré les difficultés rencontrées par les « pionnières » de la cuisine à la cocotte-minute. Elles auront dû, en effet, oublier beaucoup de ce qu’elles avaient appris auprès de leur mère, acquérir de nouveaux réflexes et surtout ne pas oublier de diviser par deux ou trois les temps de cuisson. Après 50 ans d’existence et 50 millions d’unités vendues de par le monde, la super-cocotte et ses descendants constituent une belle réussite.

 L’intérêt scientifique.

L’étude de l’évolution, pendant la montée en température, du mélange eau liquide - vapeur d’eau - air enfermé dans la marmite peut donner lieu à des développements intéressants qui concernent la physique classique. De même, le temps de cuisson, deux à trois fois plus faible que dans les conditions ordinaires, s’explique par l’augmentation avec la température de la vitesse des réactions chimiques, conséquence directe du comportement de certains électrons des composants conforme à l’ « effet tunnel », phénomène typiquement quantique. Les lois physiques de la Nature étant éternelles, nos instruments scientifiques anciens sont toujours d’actualité !  La collection du lycée Bertran de Born sera exposée aux Archives départementales de la Dordogne à Périgueux du 9 mai au 26 août. Sa visite pourra être enrichie par le catalogue « Physique impériale », réalisé sous la direction de Francis Gires et édité par l’A.S.E.I.S.T.E. (Association de Sauvegarde et d’Etude des Instruments Scientifiques et Techniques de l’Enseignement) et les fiches d’accompagnement préparées par l’A.C.S.B.D.B. (Amis du Cabinet Scientifique de BDB).

C. TERRIEN